|
RECHERCHE SUR LE SITE
Références bibliographiques avec le catalogue En plein texte avec Google Recherche avancée
Tous les ouvrages
numérisés de cette bibliothèque sont disponibles en trois formats de fichiers : Word (.doc), PDF et RTF |
Collection « Les auteur(e)s classiques »
Une édition électronique réalisée à partir du texte de Cesare Lombroso (1835-1909), L’homme criminel. Criminel-né - Fou moral - Épileptique - Criminel fou - Criminel d'occasion - Criminel par passion. Étude anthropologique et psychiatrique. Tome premier avec figures dans le texte. Deuxième Édition française traduite sur la cinquième édition italienne. Paris: Ancienne Librairie Germer Baillière et Cie, Félix Alcan, Éditeur, 1895, 567 pp. [Merci à Mme Maristela Bleggi Tomasini, avocate, Porto Alegre - Rio Grande do Sul - Brasil de nous avoir prêté cet ouvrage précieux.] Une édition numérique réalisée par Janick Gilbert, bénévole, interprète en langage dcs signes, Cégep de Chicoutimi, Ville de Saguenay. Lettre de M. Taine à M. Lombroso Paris, 12 avril 1887. Très honoré Monsieur, Sur la méthode que vous suivez et sur les résultats que vous obtenez je n’ai, comme tous les amateurs de vérité et de science, que des félicitations à vous offrir ; vous avez ouvert une voie nouvelle, et sur vos pas les découvertes se multiplieront. Que les faits moraux, comme les faits physiques, aient leurs conditions précises, cela est maintenant évident pour tout homme de bonne foi qui a fait les études nécessaires ; rien de plus utile que la connaissance de ces conditions et des indices qui les signalent. Mais je vois avec quelque chagrin l’abus que beaucoup de personnes mal informées font d’un principe si certain. Comme vous, je pense que déterminisme et responsabilité sont deux termes parfaitement conciliables ; bien plus, je pense qu’il faut être déterministe pour comprendre les conséquences de la responsabilité. Les deux grandes écoles de morale en ce monde sont les stoïciens dans l’antiquité, et les puritains dans les temps modernes ; les stoïciens pendant cinq cents ans, les puritains, pendant trois cents ans, ont étudié, avec une attention passionnée et une précision extraordinaire, la question du bien et du mal moral ; jamais il n’y eut de conscience si rigide et si délicate. Et cependant, stoïciens et puritains étaient non seulement déterministes, mais encore prédestinatiens. Je suis donc fort loin d’entrer dans les idées humanitaires de nos juristes ; si j’étais juriste ou législateur ou juré, je n’aurais aucune indulgence pour les assassins et pour les voleurs, pour le « criminel né », pour le « fou moral ». Quand dans la vie totale, dans l’organisation intellectuelle, morale, affective du délinquant, l’impulsion criminelle est isolée, accidentelle et probablement passagère, on peut et même on doit pardonner ; mais plus cette impulsion est liée à la trame entière des idées et des sentiments, plus l’homme est coupable et doit être puni. Vous nous avez montré des orangs-outangs lubriques, féroces, à face humaine ; certainement, étant tels, ils ne peuvent agir autrement qu’ils en font ; s’ils violent, s’ils volent, s’ils tuent, c’est en vertu de leur naturel et de leur passé, infailliblement. Raison de plus pour les détruire aussitôt qu’on a constaté qu’ils sont et resteront toujours des orangs-outangs. À leur endroit je n’ai aucune objection contre la peine de mort, si la société y trouve profit. Paris, 12 avril 1887. TAINE.
|