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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

L'enseignement de la philosophie. I. Au Canada français. (1936)
Avant-propos


Une édition électronique réalisée à partir du livre de Hermas BASTIEN, L'enseignement de la philosophie. I. Au Canada français. Montréal: Les Éditions Albert Lévesque, 1936, 223 pp. Collection “Documents historiques.” Une édition numérique réalisée par Vicky Lapointe, historienne et responsable d'un blogue sur l'histoire et le patrimoine du Québec: Patrimoine, Histoire et Multimédia.

[7]

L'enseignement de la philosophie.
I. Au Canada français
.

Avant-propos

"En théologie, je trouve beaucoup d'essais, nous avons quelques esprits bien formés ; je ne connais qu'un auteur, dont la modestie reconnaît les limites de son œuvre, mais que nous devons estimer un maître...

"En philosophie, je cherche ; le maître est à venir".
S. E. le cardinal Villeneuve,
(au Cercle Universitaire de Montréal,
le 13 janvier 1934)

La renaissance thomiste au dix neuvième siècle, dans les différents pays de la chrétienté, a fait l'objet de maintes études historiques. Œuvres synthétiques et monographies abondent. L'ouvrage de Picavet [1] en retrace les étapes, en Italie, en Allemagne et en Belgique. Si l'abbé Georges Michelet a signé une élégante étude sur le mouvement, en France, c'est peut-être le Père Gustave Neyron, S.J. qui en a le mieux exposé les origines [2]. Il convient de noter deux ouvrages anglais. Celui de l'abbé John Zybura [3] contient des communications précises de Mgr Olgiati, du Père Bernard Jansen, S.J. et du chanoine Noël sur leur pays respectif. La communication de [8] M. Noël [4] étudie le mouvement thomiste belge, et, traitant des pays de langue française, il mentionne la Suisse. Du Canada français, il n'est nullement question. L'opinion des universitaires anglo-canadiens consultés par M. Zybura n'est que vaguement favorable aux disciplines thomistes. De tous les historiens, c'est Joseph-Louis Verrier [5] qui, dans un livre publié aux États-Unis, nous accorde une plus juste considération.

Ces quelques faits justifient la publication du présent essai. Nous ne croyons pas, en toute sincérité, qu'il soit autre chose qu'une simple esquisse historique. Raconter la vie intellectuelle d'une société ressortit autant à l'histoire que narrer l'évolution de sa vie politique. Vie signifie mouvement. Elle implique luttes, revers, victoires, progressions. Vivre, c'est s'adapter, et, le cas échéant, c'est créer. Ce groupe innove, qui se façonne des institutions comme moyens de vie humaine. Fait-il de ses droits et devoirs culturels des éléments de vie spécifiée ? Il orne alors son activité d'une ambiance propre. Il humanise son atmosphère morale et sociale qui constitue le fond de son patrimoine spirituel.

[9]

Des circonstances heureuses se peuvent produire qui lui épargnent l'occurrence des tâtonnements doctrinaux. Il est des peuples qu'une égide protectrice enveloppe. Ce rare destin leur permet de se livrer à d'autres conquêtes qu'à celles de la vérité. Si facilement acquise et conservée, comme sans coup férir, la vérité risque parfois de demeurer sans éclat, comme dans ces vieilles panoplies une épée que la rouille émousse. Croyant à tort que l'histoire, telle le roman, doit comporter des trahisons, la sagesse populaire répète que les peuples heureux n'ont pas d'histoire. À la vérité, l'histoire rectiligne, sans courbes ni zigzags, existe.

Ainsi se présente l'histoire de la philosophie au Canada français. Cette philosophie, c'est le thomisme que nous croyons intensément diffusif. Ses annales offrent si peu de coups d'éclats, si peu de conquêtes sur l'ennemi, si peu de revanches à la suite de défaites, que cet essai a, au moins, le mérite de résister à la tentation d'aborder le genre critique. Il n'y succombe d'ailleurs que dans la mesure où, sans être méchant, il croit opportun de secouer le conformisme étouffant. La vérité a tout de même des droits. Il se garde d'accoler aux docteurs la mention de "satisfaits" que d'aucuns affichent à la médiocrité de tant de bacheliers. Au contraire, ces pages [10] visent à prouver qu'en dépit d'une inertie dont nous connaissons le secret et la tactique, notre climat philosophique, saturé d'un thomisme qui nous vaut plus de rapports que d'apports, a pourtant produit quelques fleurs et quelques fruits.

Nous osons croire que nos lecteurs, selon l'usage traditionnel, se partageront en optimistes et en pessimistes. Les uns estimeront trop frêles ces fleurs et ces fruits ; les autres les jugeront prometteurs de plus amples moissons. Notre effort aura sa récompense si les uns et les autres décident qu'à l'avenir leur jugement tiendra compte des circonstances dans lesquelles se développe notre nationalité, encore à l'aube de la vie intellectuelle. Qu'ils croient également que, pas plus dans le domaine philosophique où nous nous targuons d'une insurpassable supériorité que dans le domaine économique où nous admettons déjà — hommes de peu de foi — notre inéluctable infériorité, l'avance décisive et victorieuse ne se produira pas sans esprit de suite et sans effort volontaire, tenace et logique. Notre culture nous réduit à aucun poste de subalternes, nous réserve aucune fonction de remorque. D'autre part, la conservation de nos directives sociales exige une rénovation en intensité de notre doctrine philosophique.

[11]

À un cynique qui niait le mouvement, un philosophe antique en prouva jadis l'évidence, tout simplement, en marchant.

Marchons.

[12]



[1] La restauration thomiste au XIXe siècle, Paris, Alcan 1907.

[2] La Revue de philosophie, 1924, pp. 289-312.

[3] Present day thinkers and the New Scholasticism, Saint-Louis, Herder, 1926.

[4] The Neo-Scholastic Movement in French Speaking Countries.

[5] The Revival of scholastic philosophy in the nineteenth century. New York, 1909.



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le samedi 7 octobre 2017 13:11
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur associé, Université du Québec à Chicoutimi.
 



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