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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Une édition électronique réalisée à partir de l'article de Lucille BEAUDRY, “Le marxisme au Québec: une hégémonie intellectuelle en mutation (1960-1980).” Un article publié dans l’ouvrage Sous la direction de Lucille Beaudry, Christian Deblock et Jean-Jacques Gislain, Un siècle de marxisme. Avec deux textes inédits de Karl Polanyi, pp. 259-279. Québec: Les Presses de l’Université du Québec, 1990, 374 pp. [Autorisation formelle accordée par M. Christian Deblock le 29 juillet 2008 de diffuser ce livre dans Les Classiques des sciences sociales]

[259]

Le marxisme au Québec :
une hégémonie intellectuelle
en mutation (1960-1980)
.”

Lucille BEAUDRY

Un article publié dans l’ouvrage Sous la direction de Lucille Beaudry, Christian Deblock et Jean-Jacques Gislain, Un siècle de marxisme. Avec deux textes inédits de Karl Polanyi, pp. 259-279. Québec: Les Presses de l’Université du Québec, 1990, 374 pp. [Autorisation formelle accordée par M. Christian Deblock le 29 juillet 2008 de diffuser ce livre dans Les Classiques des sciences sociales]


Il convient généralement de situer l'amorce de l'emprise du marxisme au Québec dans le contexte de la Révolution tranquille dont l'effet de libéralisation des idées politiques a permis l'éclosion de multiples courants de pensée et en particulier l'expression d'idées politiques progressistes. Paradoxalement c'est dans la production intellectuelle que s'immisce et se déploie le marxisme au Québec et principalement sous la forme de périodiques d'analyse politique et d’argumentation en faveur d'une transformation radicale de la société. Bien que cette effervescence intellectuelle donne lieu à un moment donné à un développement d'organisations politiques se réclamant du marxisme, leur caractérisation a été et reste celle de la marginalité politique. Aussi, tout en ne niant pas qu'il y ait eu et qu'il y a effectivement une interaction entre les courants d'idées marxistes et le mouvement ouvrier (dont les manifestes et les luttes témoignent à plus d'un titre et dont la sociologie politique peut le mieux rendre compte), nous limiterons notre propos au marxisme comme formes prédominantes du discours politique écrit pendant près de deux décennies (1960-1980). De ce point de vue, le marxisme a exercé d'abord et avant tout une emprise idéologique sans avoir été pour autant univoque. Selon l'influence des courants du marxisme et de la problématique afférente, elle a porté des orientations politiques aussi diverses que celle qui prônait l'indépendance du Québec en opposition à celle-là même qui proclamait l'urgence de bâtir un Canada socialiste. Ces deux positions politiques ont traduit le changement idéologique du marxisme dominant, allant successivement de la prédominance de la question nationale par rapport à la lutte des classes à l'obsession de la question du parti comme moyen d'édifier le socialisme au Canada et s'ouvrant au tournant des années quatre-vingt à des remises en question qui participent d'une certaine manière de la « crise du marxisme ». C'est l'articulation de cet autre discours politique de gauche dont le renouvellement des idées passe par la réactualisation de la question nationale et de la démocratie qui peut le mieux nous permettre de saisir ce qu'il en est (ou reste) du marxisme au Québec à l'heure actuelle par rapport à ce qu'il a été.

[260]


Un marxisme à la rescousse
du nationalisme

Le contexte de la Révolution tranquille voit paraître pour la première fois au Québec des périodiques d'analyse politique déployant une argumentation en faveur d'un changement radical de la société québécoise. Revue socialiste (1959-1962), Parti pris (1963-1968), Révolution québécoise (1964-1965), Socialisme (1964-1969) expriment l'éclosion d'une pensée socialiste traduisant les préoccupations politiques des intellectuels. Pour la première fois au Québec, des collectifs de rédaction se réfèrent aux oeuvres classiques des fondateurs du socialisme (Marx, Engels et Lénine) et tentent de lier la théorie et la pratique. Ceux qui écrivent manifestent une volonté explicite d'intervenir activement pour changer la société et en particulier d'établir des liens avec le mouvement ouvrier (en l'occurrence syndical). L'initiation aux thèses de l'analyse marxiste pour étudier et prendre position quant à la réalité socio-politique québécoise illustre de façon péremptoire l'état du capitalisme au Québec, notamment sa dépendance voire la propriété anglophone (anglo-canadienne ou américaine) et son corollaire la domination nationale. Aussi, le problème de l'oppression nationale du Québec devient prédominant dans l'ensemble des débats et c'est Parti pris en rétrospective qui assume une espèce de pôle intellectuel de référence dans ce qu'il est convenu d'appeler la formulation d'un néo-nationalisme québécois [1]. Si le marxisme et l'existentialisme sartrien ont inspiré l'équipe de Parti pris dans son effort d'élaboration d'une pensée révolutionnaire proprement québécoise, le plaidoyer en faveur de la libération nationale du Québec ressort davantage de conceptions issues des théories de la décolonisation africaine (Berque, Fanon, Memmi) que des termes propres à l'analyse marxiste [2]. Selon ces thèses, le peuple québécois est colonisé, dominé politiquement par l'État fédéral, dépossédé de ses ressources économiques par le capital américain et anglo-canadien, et aliéné par rapport à sa propre culture ; d'où l'impératif de la lutte de libération nationale contre le colonialisme et le capitalisme et les mots d'ordre de « laïcisme, indépendance et socialisme » qui identifient ce courant. Cette problématique en vient à imposer la position de l'appui tactique à la bourgeoisie nationale [3] privilégiant « l'indépendance d'abord » comme préalable à la lutte pour le socialisme au Québec. Pour ces intellectuels, ce n'est qu'une fois levée l'aliénation coloniale que les travailleurs pourront s'engager dans une lutte de classes contre la bourgeoisie nationale. Accordant ainsi la préséance à la question nationale sur le socialisme, Jean-Marc Piotte écrit à propos de l'esprit qui anime alors Parti pris :

[261]

Nous nous prenions pour l'avant-garde intellectuelle de la révolution [...] Me relisant je fus littéralement étonné : je me croyais marxiste alors que ma catégorie fondamentale « analyse demeurait - si on excepte Notes sur le milieu rural, d'ailleurs seule enquête menée sur le terrain - bel et bien la nation [...] que je cherche à éclairer à la lumière des classes sociales [...] nous n'avons été que les extrémistes de l'idéal national de la nouvelle petite bourgeoisie [4].

Un tel courant d'idées « néo-nationaliste » dont l'influence, du moins auprès des intellectuels, est indéniable, non seulement apporte au nationalisme québécois un contenu progressiste tout à fait nouveau contribuant de ce fait à la résurgence de la question nationale et du discours nationaliste, mais il réussit, ce faisant, à soustraire le nationalisme de l'idéologie traditionaliste tant décriée alors par les chantres du libéralisme (Cité libre, 1950-1966). Tout en exerçant une espèce d'hégémonie sur le discours Politique de gauche pendant la décennie soixante, ce courant a néanmoins émergé de confrontations avec les adeptes de la nécessité de fonder un parti révolutionnaire des travailleurs. C'est le sens entre autres du « Manifeste 1965-1966 » (Parti pris, vol. 3, nos 1-2, 1965, p. 2-42) émanant des tentatives de ralliement de l'avant-garde intellectuelle au mouvement ouvrier lors de la fondation du Mouvement de libération populaire (MLP) (regroupant l'équipe de la revue Révolution québécoise, le Groupe d'action populaire et la Ligue ouvrière socialiste), de leur brève adhésion au Parti socialiste du Québec (PSQ) et de la polémique au sein de Parti pris à l'occasion de la fondation du MSA-PQ. Cette polémique ouvre la dissidence de ceux qui animent en 1968 le Comité indépendance-socialisme (CIS) parce qu'ils considèrent que le MSA-PQ conduit à la prise du pouvoir une classe hostile à celle des travailleurs [5]. De sorte que la double conquête de la libération nationale et de la révolution socialiste au Québec caractérisant l'expression du marxisme des années soixante se transforme au terme de cette décennie en l'affrontement de deux thèses : d'une part, celle de l'indépendance d'abord ou de l'appui tactique à la bourgeoisie nationale incarnant la gauche du mouvement national et, d'autre part, celle du courant « socialiste » dont le débat politique tente de se poursuivre dans des organisations de forme « groupusculaire » et, entre autres, au sein du Front de libération populaire (FLP 1968-1970) [6].

Le marxisme au Québec a donc « abord et avant tout constitué un mouvement d'idées incarné dans des revues d'analyse politique donnant lieu par la suite à la mise sur pied de groupes organisés dont la pratique et le débat théorique interagiront. Que le marxisme dans les années soixante ait contribué (servi) à étayer un nationalisme progressiste, à redonner au courant nationaliste ses lettres de créance en l'exprimant [262] sous la forme d'un nationalisme socialiste n'a pas signifié pour autant que ce courant d'idées soit parvenu à fixer les intérêts de la classe ouvrière dans la question nationale ni à les traduire politiquement face à la montée du mouvement national dirigé par le Parti québécois. Jusqu'à la fin des années soixante, les courants marxistes militant pour la libération nationale et pour la révolution socialiste au Québec sont extérieurs au mouvement ouvrier et c'est précisément ce constat d'inorganisation politique de la classe ouvrière qui modèlera les positions idéologiques et politiques qui seront ultérieurement développées au nom et à l'aide du marxisme. De sorte que l'emprise du marxisme au Québec, comme discours et pratique politiques, connaît son plus grand essor au cours des années soixante-dix. Cette décennie de conjoncture politique ponctuée par la question nationale (des événements d'octobre 1970 au référendum, en passant par l'avènement au pouvoir du Parti québécois en 1976) est en même temps celle de la plus grande effervescence intellectuelle et politique du marxisme dont le paroxysme paraît être atteint à un moment donné par la prévalence de sa version la plus orthodoxe.


Un marxisme en quête (ou en mal)
d'une tradition socialiste,
ou des dévoiements vers l'orthodoxie

La crise d'octobre 1970 et sa répression portent les intellectuels à remettre en question le terrorisme mais aussi et surtout le nationalisme. Désormais les intellectuels révolutionnaires s'engagent vers une actualisation du marxisme ou vers un marxisme devant découler essentiellement de la pratique de sorte que non seulement la production intellectuelle connaît les courants les plus diversifiés de l'analyse marxiste [7], mais c'est la mise sur pied de groupes organisés et leur pratique qui vont désormais orienter les débats (théoriques) politiques. À la faveur de la lutte pour le socialisme et de la recherche des intérêts stratégiques du prolétariat, s'estompe la prédominance de la question nationale et s'affirme progressivement l'obsession de la question du parti.

Les événements d'octobre, l'apogée et l'échec du terrorisme, confirment les intellectuels marxistes non seulement de la précarité de leur position mais surtout de leur isolement par rapport au milieu ouvrier, et renforcent leur volonté de confronter les analyses marxistes à la pratique de la lutte de classes. C'est l'amorce d'un long processus de recherche et d'action sur les questions de stratégie révolutionnaire et du parti à édifier.

[263]

Cette orientation politique (contre le nationalisme et pour le socialisme et la nécessité du parti) prend forme dans le développement des Comités « action politique (CAP) et du Front d'action politique (FRAP) et des manifestes s'y rapportant [8] : entre autres, entre décembre 1971 et février 1972, deux manifestes pour l'organisation politique des travailleurs par les CAP Saint-Jacques et Maisonneuve ; les propositions de « parti des travailleurs » de la part des centrales syndicales dans la foulée du front commun de 1972 ; le manifeste du Front d'action politique créé en 1969 regroupant des comités de citoyens du sud-ouest et de l'est de Montréal dans une organisation politique municipale (publié sous le titre : Les salariés au pouvoir, Montréal, Les Presses libres, 1970, 138 pages).

À la suite du congrès de mai 1971 caractérisé par une crise de direction, des militants mettent sur pied des Comités d'action politique sur la base de quartier et d'entreprise ; après le congrès de 1972, ils se séparent des militants du FRAP qui alors se fixent comme tâche de démocratiser et d'unifier les forces syndicales et de créer le parti politique des travailleurs. Pour les scissionnistes, il ne s'agit plus d'identifier des solutions aux problèmes qui se posent dans la ville mais de mettre en place des organisations en vue d'agir à long terme sur les causes des problèmes de la classe ouvrière [9] ; et cette position s'impose surtout dans les débats à l'occasion de la publication de la brochure de C. Gagnon, Pour le parti prolétarien, éditée et diffusée par l'équipe du journal en octobre 1972. En référence au Que faire ? de Lénine et à la « ligne de masse » de la pensée Mao Tsé tung, cette brochure ébauche le discours de la conception bolchévique du parti ouvrier à construire. Elle dénonce le « cul-de-sac nationaliste » et la « gauche du PQ » autant que le réformisme social-démocrate de ceux qui, pour créer le « parti des travailleurs », font appel aux syndicats. Pour le parti prolétarien pose surtout l'impératif de la lutte idéologique par la diffusion militante d’un journal de propagande (ce sera le journal En lutte ! dont l'avant-premier numéro paraît au printemps 1973) et se donne comme objectif stratégique de constituer une organisation d'avant-garde. Elle condamne aussi la position « ouvriériste » privilégiant l'implantation des intellectuels révolutionnaires en milieu ouvrier. Or celle-ci constitue l'essentiel de l'argumentation développée entre autres par la revue Mobilisation (mai 1971 - octobre 1975).

La revue Mobilisation est lancée à l'initiative du CAP Saint-Jacques en mai 1971 et reprend le nom donné par le Front de libération populaire (FLP) et le Mouvement syndical politique (MSP) à son journal paru entre 1969 et février 1970 en cinq numéros et dans une moindre mesure par le Bulletin populaire (1973-1976) de l'Agence de presse libre du Québec (APLQ). Ces deux publications tentent respectivement de faire état des réflexions et bilans d'expériences militantes au sein du mouvement ouvrier. Des débats menés au sein de ce courant [264] dit « implantationniste » animé par Mobilisation, l'APLQ, le Centre de recherche d'information du Québec (CRIQ), le Regroupement des comités de travailleurs (RCT) et le Noyau des petites entreprises (NPE) émergent progressivement deux positions politiques opposées : la ligne révolutionnaire de lutte pour l'unité du mouvement révolutionnaire et l'édification du parti ouvrier révolutionnaire [10] et la ligne réformiste social-démocrate (identifiée à l'APLQ et au RCT) axée sur un travail d'organisation de masse inspiré de la politique d'implantation comme « voie royale » menant au prolétariat [11].

L'éviction de la tendance dite réformiste au terme de cette lutte de lignes consacrera Mobilisation comme organe d'expression du courant révolutionnaire revendiquant la tâche de l'« édification du Parti communiste de type nouveau [12] ». Dès lors s'affirment des thèses issues du marxisme-léninisme et de la pensée Mao Tsé tung à l'appui de la problématique qui se développe à propos de la question du parti révolutionnaire. On est opposé au courant trotskyste [13], en particulier au GSTQ fondé en 1973, courant selon lequel un parti ouvrier doit être créé à l'initiative des syndicats comme stade transitoire vers la création du parti révolutionnaire ; Mobilisation s'oppose aussi aux conceptions du journal En lutte ! selon lequel les révolutionnaires ne doivent pas prétendre à la direction des luttes de masses mais plutôt former une avant-garde par l'étude et la pratique de l'agitation-propagande. La revue Mobilisation postule l'implantation de militants intellectuels en milieu ouvrier (entreprises, quartiers) à la base du travail idéologique et politique comme moyen de lier les révolutionnaires aux « prolétaires avancés » et comme moyen d'implanter l'organisation révolutionnaire dans les rangs du prolétariat [14]. Cette position fonde et oriente divers groupes militants (notamment la Cellule militante ouvrière (CMO) et la Cellule ouvrière révolutionnaire (COR) qui mettent tous à l'ordre du jour la création d'une organisation révolutionnaire pré-parti se réclamant du marxisme stalinien, d'où provient en 1975 la Ligue communiste marxiste-léniniste du Canada (LCMLC) [15]. La Ligue communiste naît de la fusion du MREQ, de la CMO et de la COR. La Ligue et le groupe En lutte ! constituent les principaux protagonistes du courant marxiste-léniniste (m-l) manifestant par leur travail d'agitation-propagande l'emprise au Québec du marxisme d'obédience maoïste et de la Révolution culturelle (prolétarienne) chinoise.

S'il est concevable que, dans une société où il n'y a pas d'organisation politique de la classe ouvrière, la question du parti devienne à ce point proéminente, il est étonnant qu'elle emprunte la voie de l'officialisation stalinienne du léninisme ou de la « science marxiste-léniniste » et ce, dans la mesure où elle provient de marxistes qui précisément entendent faire de leurs positions l'émanation de la pratique politique. Or c'est la pensée Mao Tsé tung et en particulier l'analyse des [265] contradictions, qui va prescrire à En lutte ! et à la LCMLC (au-delà de leurs divergences politiques et organisationnelles) l'analyse de la réalité québécoise et canadienne. Selon cette analyse, la solution de la question nationale québécoise renvoie à la position de type léniniste du droit à l'autodétermination, faisant de cette question une contradiction secondaire subordonnée à la contradiction principale opposant le prolétariat et la bourgeoisie au Canada ; elle fait de la Chine (et de l'Albanie) un modèle stratégique de mobilisation des masses pour créer le parti révolutionnaire nécessaire au renversement de la bourgeoisie canadienne et à l'édification d'une société socialiste au Canada, 16 nécessitant pour ce faire l'unité du prolétariat des deux nations [16].

Même si ces deux organisations ont une histoire et une évolution respectives, ensemble elles imposent un marxisme orthodoxe qui, pendant les années soixante-dix, en particulier de 1974 à 1979, exerce une espèce d'hégémonie au sein des courants progressistes :

L'importance du « M-Lisme » ne provient pas seulement du fait qu'il représente un courant politique organisé pouvant compter sur quelques milliers de membres et de sympathisants au Québec et quelques centaines au Canada anglais. Elle provient surtout de ce que le courant « M-L » a su, dans les années 1975-76, imposer la liquidation ou l'inféodation de toute une série d'instruments de lutte idéologique de la gauche du mouvement ouvrier et populaire (journaux, revues, etc.) et par la suite se tailler une sorte de monopole idéologique. Si bien qu'en 1980 encore, la gauche... se trouve « super harcelée » par les instruments d'agitation et de propagande des « M-L » et peut compter sur très peu d'instruments alternatifs d'information et de formation pour suivre l'évolution des luttes et articuler son point de vue [17].

La prédominance idéologique apparaît décisive dans la plupart des publications périodiques d'intervention politique à ce point qu'elle en vient à déterminer dans certains cas le cours de leur développement. Ainsi en est-il des revues Champs d'application (1974-1977) et Stratégie (1972-1977) qui cessent de paraître par un appel à servir la cause du prolétariat au Canada, soit à rallier respectivement En lutte ! et la Ligue ; de même, la revue Chroniques (1975-1978), sommée de prendre position et de se définir face à la montée des organisations « M-L », cesse d'être publiée au terme d'un débat (avec Stratégie entre autres) à propos de la « culture prolétarienne » et du marxisme-léninisme dans le champ de la production culturelle et sur la notion du réalisme socialiste.

Jusqu'au contexte référendaire, la prégnance du marxisme stalinien orthodoxe s'effectue au détriment du courant des indépendantistes [266] socialistes. Identifiés à la position d'appui critique au Parti québécois, ces derniers n'ont jamais cessé de s'exprimer depuis Parti pris. Préoccupés de lier la lutte contre l'oppression nationale et la lutte pour le socialisme au Québec, ces intellectuels vont néanmoins substituer au marxisme décolonisateur des années soixante un ensemble de concepts et une grille d'analyse appartenant au courant du structuro-marxisme français. Les thèses d'Althusser et de Poulantzas entre autres viennent étayer les analyses de la question nationale, des classes sociales, de l'État, du caractère de classe du Parti québécois, des diverses fractions de la bourgeoisie québécoise et du développement du capitalisme au Québec [18]. Ce courant se déploie par un long procès de démarcation/différenciation par rapport à l'hégémonie du Parti québécois sur le mouvement national et des « M-L » sur les courants socialistes ; démarcation que permet de retracer l'analyse de ses publications successives (Socialisme québécois (1970-1974), Chroniques (1975-1978), Les Cahiers du socialisme (1978-1984), Presse libre (1980-1983) et les brochures du Centre de formation populaire (CFP) [19]. Celui-ci ayant été lié au Regroupement des comités de travailleurs (RCT), n'a cessé de militer en faveur d'une organisation politique autonome des travailleurs devant émerger des syndicats et des groupes populaires et de promouvoir l'indépendance du Québec. Cependant, l'échec référendaire et les analyses y afférant ainsi que la critique du marxisme orthodoxe apportent à ce courant les éléments de renouvellement du discours de la gauche indépendantiste ; discours reformulé sous l'appellation de « socialisme et indépendance [20] », consacrant du moins dans son expression écrite la rupture avec la position de l'appui critique au Parti québécois en même temps que l'affirmation d'une position plus offensive vis-à-vis du discours « M-L ». L'ensemble des publications pour le socialisme et l'indépendance tente d'inscrire la voie politique alternative à la fois au nationalisme du Parti québécois et au socialisme de type marxiste-léniniste.

Davantage préoccupés des mouvements sociaux que de la lettre du marxisme, ces textes politiques publiés au tournant des années quatre-vingt participent néanmoins des interrogations sur les lacunes de la théorie marxiste, en particulier sur certaines notions du marxisme dominant autant que sur les problèmes des socialismes existants ou des régimes qui s'en réclament. Situant ce questionnement à l'aide de certains concepts fondamentaux du marxisme, ces textes transcrivent ici ce que d’aucuns appellent la « crise du marxisme [21] ». C'est en ce sens une forme de « marxisme en question » qui trace la voie du renouvellement des idées propres au discours politique de la gauche québécoise, en appelant simultanément la réactualisation de la question nationale et de la démocratie socialiste.

[267]


Un marxisme en question
ou le renouvellement des idées
à l'affût des mouvements sociaux

La reformulation du discours politique de gauche s'élabore à partir des critiques, voire d'une argumentation opposée aux partis et aux courants politiques concurrents, à savoir le Parti québécois et les organisations d'extrême-gauche (En lutte !, LCMLC). Elle procède de la combinaison de matériaux intellectuels anciens (l'indépendantisme de la gauche des années soixante) et d'éléments nouveaux avec une prédilection pour des thèmes considérés comme actuels ; ainsi en est-il de la question des femmes et des tentatives d'intégration idéologique de l'apport du féminisme notamment et ce, tout en conservant la tradition intellectuelle des mouvements socialistes quant au rejet du mode de production capitaliste.

Alors que le Parti québécois est dénoncé certes pour son visage de classe bourgeoise mais surtout pour l'évacuation du projet indépendantiste, la gauche « M-L » l'est pour son dogmatisme, son sectarisme et son autoritarisme puisé à l'enseigne du « centralisme démocratique ». Double rejet issu de la genèse même du courant : originellement élaboré par cette fraction des forces progressistes qui a « abord misé sur la capacité du Parti québécois d'engager le Québec sur la voie sinon de l'indépendance du moins de la souveraineté politique, se réservant la tâche ultérieure de conduire cet État souverain vers la social-démocratie, le socialisme ou l'autogestion (selon le modèle et la stratégie privilégiés), le travail de production idéologique s'effectue progressivement par invalidation/désignation des différences et condamnations des adversaires militant pour le socialisme au Canada. Ce processus s'effectue néanmoins de façon telle que des rapprochements au niveau de la pratique politique ne soient pas exclus. Si, à première vue, on peut penser à la gauche du Parti québécois, les analyses sur la dissolution d'En Lutte ! (voir nos 10/11, Les cahiers du socialisme) témoignent également d'une telle ouverture ; sans compter l'appel du Manifeste des Cent et des publications du Regroupement pour le socialisme (RPS) au ralliement des forces progressistes existant au Québec.

L'exposé des thèses procède de la réfutation des forces et partis adverses. Ainsi, du document des auteurs Désy, Ferland, Lévesque et Vaillancourt, La conjoncture au Québec au début des années '80, l'introduction, les chapitres III, IV et V traitent des courants de la gauche y compris et surtout des « M-L », et de Ferland et Vaillancourt, Socialisme et indépendance au Québec, piste pour le mouvement ouvrier et populaire (coédition Socialisme et indépendance, Éditions [268] coopératives Albert Saint-Martin, 1981), dont six chapitres sur sept apportent un éclairage sur le Parti québécois et la question nationale. Si la critique par invalidation sert ainsi d'argument à l'autolégitimation, elle n'intervient pas au niveau de la polémique directe. Par exemple la dénonciation de l'extrême-gauche (PCO/EL) sous l'interpellation de « m-liste » agresse moins directement la pratique du militantisme que l'idéologie ou le dogmatisme d'un discours émanant d'une ligne politique fignolée à l'extérieur (Chine ou Albanie) et faisant fi des acquis du mouvement ouvrier réel, (à savoir des syndicats et de groupes populaires) et surtout la question nationale [22]. Néanmoins le rejet s'opère avec plus de virulence à propos du modèle stalinien considéré comme symbole de centralisation excessive. Par ailleurs, la dénonciation de la politique gouvernementale péquiste se trouve enrobée dans un bilan sur le capitalisme, ses crises successives, la gestion politique de la crise et la question nationale de sorte que « l'appui critique » au Parti québécois n'est jamais complètement exclu (du moins à l'occasion des élections d'avril 1981) [23].

De même, jusqu'au référendum de mai 1980, la substance analytique des Cahiers du socialisme aura été alimentée par la question nationale, la nature de classe du Parti québécois et en particulier le débat entre les deux tendances (incarnées par les écrits de Gilles Bourque et Pierre Fournier contre Jorge Niosi) renvoyant respectivement à la nature bourgeoise non monopoliste du Parti québécois ou à la thèse du Parti québécois comme formation politique petite-bourgeoisie ; celle-ci [24] traduisant politiquement la position de l'appui critique au gouvernement péquiste, des possibilités d'alliances entre le mouvement ouvrier et populaire et le Parti québécois et une attitude attentiste face à l'État québécois ; celle-là, posant le rapport au pouvoir en termes de rupture avec le Parti québécois [25]. Cette tendance s'affirme déjà en 1968 avec la mise sur pied du « Comité pour l'indépendance et le socialisme » qui adopte une attitude de critique radicale à l'égard du Parti québécois, force montante du mouvement national de l'époque.

Nonobstant ce débat, et malgré les mots d'ordre réitérés invoquant la nécessité pour le mouvement ouvrier et populaire de se constituer en acteur autonome (en particulier durant le débat référendaire), les publications du CFP, du RPS, y compris Les cahiers du socialisme, se rangent dans le camp du OUI, considérant que la victoire du OUI offre au mouvement ouvrier la possibilité d'ébrécher le système fédéraliste dans le contexte des rivalités interbourgeoises au Canada [26]. C'est cette prévalence de la question nationale sur le socialisme que tente d'éviter la reformulation du courant « socialisme et indépendance » en posant l'indissociabilité des deux termes.

[269]


De la question nationale

Le courant « socialisme et indépendance » veut actualiser l'option indépendantiste en termes de luttes de classes. L'indépendance est désormais posée comme axe central dans une stratégie de lutte pour le socialisme au Québec. Selon cette optique, l'imbrication de l'oppression nationale et de l'exploitation capitaliste marque la société québécoise, traverse l'histoire des luttes de résistance à l'oppression nationale du peuple québécois et caractérise la conjoncture actuelle. Ce courant de pensée en appelle au dynamisme du mouvement ouvrier pour infuser au projet indépendantiste un potentiel de rupture avec le capitalisme canadien et l'impérialisme américain. Il tente de rattacher la spécificité québécoise aux questions nationales existant au sein des États capitalistes avancés. Il reprend la problématique des mouvements nationaux dans les pays du centre impérialiste, selon laquelle le Québec est dominé par la bourgeoisie canadienne et par une bourgeoisie québécoise « régionale ». Une telle bourgeoisie, à la fois autonome au sein d'un espace économique régional et intégrée à l'entité politique canadienne et à l'économie nord-américaine, ne saurait conduire (à la manière d'une bourgeoisie nationale) un mouvement débouchant sur la séparation politique du Québec [27]. Il reprend à son compte le discours critique de la dépendance des capitalistes québécois à l'endroit du grand capital canadien et américain :

[...] les capitalistes québécois restent cantonnés dans les activités délaissées par les capitalistes canadiens et étrangers, dans des secteurs peu productifs et au niveau du marché local et régional (Manifeste, p. 20).

Comme si l'existence d'une bourgeoisie québécoise prospère pouvait précipiter la fin de l'oppression nationale. De même, l'indépendantisme politique prévaut dans les multiples analyses sur la politique du gouvernement du Parti québécois [28]. De sorte que la distanciation par rapport à la position d'appui critique (au Parti québécois) ne vaut désormais qu'en raison de l'objectif de la réalisation conjointe de l'indépendance et du socialisme. C'est principalement sous le seul aspect du « socialisme » que les nationalistes de gauche se distinguent des socialistes non indépendantistes de type « M-L », en adoptant l'idéologie du socialisme démocratique.


De la démocratie socialiste

L'argumentation procède du rejet du capitalisme mais, contrairement aux prédécesseurs marxistes-léninistes, ce rejet ne s'en prend pas aux [270] seules dimensions de l'exploitation d'ordre économique. Le mode de production capitaliste n'est pas une contradiction principale d'où découlent les autres contradictions et dont un effet majeur avait consisté entre autres à reléguer au second plan le problème de l'oppression nationale. Le système est plutôt appréhendé comme un ensemble complexe de contradictions et la réflexion porte sur la société tout entière et le système des rapports sociaux. De même, la propriété privée des moyens de production ne revêt pas une importance exclusive de sorte que son élimination devienne la solution sine qua non. La réflexion concerne les hiérarchies et les inégalités que le système des rapports sociaux ne cesse de reproduire, ce qui entraîne les multiples luttes dont l'ensemble illustre concrètement l'état de société en crise. Le constat des diverses crises prend sa signification dans la dénonciation de l'organisation institutionnelle des pouvoirs (Manifeste, p. 43) caractérisée par une concentration des pouvoirs de décision (aux mains d'une minorité de gestionnaires) fondée sur le pouvoir d'État, les compétences technocratiques ou sur la propriété des moyens de production. L'accent est mis sur la dépossession de leur autonomie et du contrôle de leur activité dont sont victimes les producteurs, ce qui pose la nécessité de la réappropriation des pouvoirs de décision. « Il nous faut réunir les conditions qui vont permettre à la majorité ... d'exercer un pouvoir effectif... » (Manifeste, p. 43). La lutte des classes est réinterprétée en termes de rapports de domination, de contradictions entre dirigeants et exécutants, et considère cette aliénation de l'autonomie comme l'explication (fondamentale) des multiples injustices. Cette perspective rend compte à la fois des divers fronts de luttes et de l'incapacité du système en place de les résoudre.

À cette critique de la société capitaliste s'appose une méfiance à l'endroit des modèles existants de société dite socialiste (voir Les cahiers du socialisme, nos 9 et 10/11, etc.). Cette position rend compte du changement idéologique par rapport au marxisme orthodoxe, voire de la distanciation à l'égard des groupes maoïstes (PCO, En Lutte !), y compris des courants trotskystes. Les socialismes existants interviennent désormais comme contre-modèle. Aussi, le terme socialisme renvoie à une signification non seulement opposée aux systèmes sociaux expérimentés dans le monde dit communiste mais encore à un projet socialiste qui prend racine dans les luttes sociales immédiates (RPS, Ses orientations, ses interventions, son fonctionnement, Éditions Socialisme et indépendance, 1982, p. 27-39). La critique des socialismes existants porte sur le caractère autoritaire et bureaucratique des pouvoirs et corrélativement sur le type de domination d'une nouvelle classe dirigeante qui « entrave ou étouffe l'expression d'un véritable pouvoir ouvrier et populaire » (op. cit., p. 29). De même, on ne souscrit pas à l'interprétation (trotskyste) selon laquelle le stalinisme [271] engendre un état ouvrier dégénéré pouvant désigner un modèle socialiste se situant avant l'avènement de Staline.

Le socialisme dont on se réclame ne repose pas non plus sur l'existence d'un parti unique dont le monopole sur l'État, la presse, les organisations syndicales, populaires et culturelles contribue à effectuer une « transition bloquée » (RPS, op. cit., p. 29). La tradition socialiste invoquée n'est ni la révolution d'octobre 1917, ni le léninisme et encore moins le stalinisme ou le maoïsme mais certains éléments des oeuvres de Marx et Engels, tels la sociologie de la lutte des classes, la critique du capitalisme, le projet de société socialiste, la solidarité internationale, etc. En aucun cas, il ne s'agit de trouver un programme déjà expérimenté avec succès mais bien de créer « produire, travailler, vivre autrement » (RPS, op. cit., p. 30), d’effectuer « un changement réel dans les modes de vie et de travail » (Manifeste, p. 39) ; d'inventer une société socialiste développée, industrialisée, alphabétisée misant sur les potentialités exceptionnelles des sociétés capitalistes développées, sur les possibilités de contrôle démocratique qu'elles recèlent et sur l'urgence de concevoir un projet social alternatif qui tienne compte de ce niveau de développement.

Les formes socialistes d'existence collective qui échappent à la fois à l'exploitation du capitalisme et à l'autoritarisme des socialismes existants sont à inventer. Il s'agit d'édifier une société sans inégalités (en particulier celles qui existent entre les hommes et les femmes) et où notamment les pouvoirs de direction et de décision ne sont plus accaparés par une minorité. Le dépérissement des pouvoirs capitalistes comme l'éviction des bureaucraties politiques doivent permettre d'atteindre l'objectif central d'instaurer une démocratie de « pouvoir populaire ». Le sujet n'est plus le prolétariat et sa dictature mais les « classes ouvrière et populaires » (Manifeste, p. 7) englobant toutes les catégories sociales qui participent à divers titres à la production de biens et de services et se trouvent en situation d'aliénation dans le système actuel. Le contrôle collectif par la socialisation des moyens de production et d'échange ne saurait en aucune façon signifier une nouvelle dictature de classe, dût-elle être celle du prolétariat [29].

Au contraire, il s'agit de concilier socialisme et libertés démocratiques (RPS, op. cit., p. 28), ce qui suppose un régime politique pluraliste reconnaissant la coexistence de plusieurs partis politiques. Le projet socialiste procède de la volonté de valoriser les diverses formes de pratiques militantes tout en respectant l'autonomie des mouvements sociaux comme autant de lieux d'exercice du pouvoir populaire à développer (Manifeste, p. 44). Ce socialisme émanant d'un pouvoir populaire effectif repose sur trois axes : le premier commande la planification démocratique, c'est-à-dire « la socialisation des moyens de production et d'échange de façon à éliminer le pouvoir décisionnel privé » [272] (Manifeste, p. 35) par « l'élaboration d'un plan d'ensemble de développement, cette démocratisation du pouvoir économique doit s'exercer tant au niveau local et régional que national et laisser une large place à l'autonomie des diverses collectivités » (Manifeste, p. 37) ; le deuxième, l'égalité sociale, l'instauration de rapports sociaux égalitaires et solidaires devant « éliminer toutes les formes de domination » (Manifeste, p. 46) et la liberté par la reconnaissance comme inaliénables des droits et libertés de la personne autant que des droits et libertés des collectivités (Manifeste, p. 44).

Si la socialisation constitue la notion centrale du projet socialiste, à l'encontre des États socialistes de type autoritaire et aussi du pouvoir d'une minorité capitaliste, la décentralisation, la multiplication des lieux de gestion collective est présentée comme nécessaire à la complexité des sociétés développées tout en agissant comme moyen propice à combler l'écart entre les instances de décision et d'exécution. Cette position est proclamée sans considérer les difficultés de concilier les exigences d'une planification des grandes orientations et celles de l'autogestion des entreprises, des services, des collectivités locales, etc.

La spécificité de ce discours socialiste vise donc la négation de toutes les hiérarchies et formes autoritaires et, en premier lieu, du centralisme démocratique valorisant a contrario les actions créatrices de groupes autonomes. Et, conformément au projet social global de réconcilier socialisme et liberté, la liberté devrait se réaliser dans la gestion collective des conditions de travail et des milieux de vie sur la base du maximum « autonomie et s'exercer aussi au niveau politique où les divers courants doivent bénéficier de la plus complète possibilité d'expression. Une telle position pluraliste est présentée non pas comme une concession libérale mais plutôt comme la condition même du dynamisme des éléments progressistes de la société [30]. Le socialisme prôné revendique « plus de liberté, plus d’espaces de liberté [31] ».

Ce courant propose une critique sociale et un projet politique qui placent au coeur de la réflexion les conditions de mise en place d’une démocratie de pouvoir populaire. La légitimité de l'autorité davantage que l'exploitation économique occupe le centre de la critique et sert à la double récusation du mode de production capitaliste et du socialisme bureaucratisé à parti unique (RPS, Ses orientations, p. 29). Contre l'aliénation des pouvoirs de décision, le socialisme projeté entend rendre les centres de décision aux personnes concernées dans les entreprises, les quartiers, et mise sur l'autonomie des organisations syndicales et populaires par rapport aux organisations politiques socialistes (RPS, op. cit., p. 29), excluant ainsi la conception léniniste de direction politique. Les organisations politiques socialistes (MS et RPS) sont investies d'une responsabilité politique de coordination des luttes sociales et elles doivent traduire dans la sphère politique toutes les [273] manifestations d'opposition au régime [32]. Le Mouvement socialiste et le Regroupement pour le socialisme formulent leurs visées coordonnatrices en ces termes : « Autonome et respectueux des autonomies, le mouvement socialiste sera un lieu de convergence pour que les luttes et les revendications ouvrières et populaires débouchent sur un cadre politique plus large » (MS, p. 55).

Conçu contre le « centralisme démocratique » comme principe d'organisation politique, le parti n'est plus l'instrument unique de la lutte politique et ne prétend pas à l'exclusivité de la direction des conflits. La proclamation de la politique de coordination conjuguée à la perspective pluraliste (RPS, Ses orientations, p. 29-30) permet de légitimer le MS, le RPS, ou toute autre organisation politique comme agent de changement socio-politique pour un projet de société alternatif, d'instaurer « les conditions d'une véritable démocratie politique » (RPS, Ses orientations, p. 28) et d'ouvrir la voie à une stratégie de coalition (Les cahiers du socialisme, no 14, printemps 1984, éditorial).

Le « socialisme » ne signifie donc plus la dictature du prolétariat sous l'égide d'un parti unique régi selon les principes du centralisme démocratique devant assumer le rôle révolutionnaire de la classe ouvrière. Cette divergence par rapport à l'orthodoxie marxiste s'exprime également par la volonté de ne chercher dans aucune société socialiste existante un modèle pour le futur [33]. Le socialisme est à inventer puisque jamais la conciliation du socialisme et de la liberté n'a été réalisée. Les garants ne sont pas dans le passé mais bien dans le présent et, en premier lieu dans les mouvements sociaux en lutte contre le système ; mouvements qui sont un lieu de militantisme [34]. Ainsi, pendant un certain temps (1980-1982), Presse libre a pu puiser dans la relation et l'interprétation des luttes du mouvement ouvrier et populaire la raison de son existence autant que l'ancrage de son action idéologique et politique et un objet de légitimation-justification de la politique définie, s'il en est, voire de l'existence du courant en tant que tel. Ainsi, l'élaboration du discours s'alimente à toutes les luttes (féminisme, écologisme, ...) où sont engagées des couches sociales désignées comme forces motrices du changement de société d'où l'appel à la constitution d'un bloc social anticapitaliste [35] ; de sorte que la transition du capitalisme au socialisme apparaît devoir se faire sous l'égide du rassemblement de toutes les catégories sociales susceptibles de s'opposer au capitalisme [36]. Tout en se gardant contre l'illusion de poser dans l'imaginaire la société idéale [37], l'élaboration idéologique trouve dans le mouvement ouvrier et les groupes populaires l'évocation d'une espèce de système autogestionnaire. Ces luttes sociales (actuelles), qu'il reste à coordonner par l'organisation politique à construire, constituent déjà la mise en oeuvre du processus d'édification d'une société québécoise socialiste. C'est en ces termes apparentés au « marxisme » de la deuxième gauche en France [38] que [274] s'ébauche le discours du projet de réalisation conjointe de l'indépendance et du socialisme au Québec, discours davantage préoccupé de la quête des mouvements sociaux autonomes que de la lettre du marxisme.

Malgré son opposition au nationalisme dominant (du PQ) et au marxisme orthodoxe (des marxistes-léninistes), malgré ses efforts pour amalgamer luttes de classes-question nationale et pour instaurer une adéquation entre des orientations politiques proposées et les luttes sociales effectives, ce discours recomposé du « socialisme démocratique », tout en étant momentanément significatif du réalignement idéologique des éléments progressistes, n'est pas parvenu à se poser comme nouveau pouvoir même symbolique. Il paraît plutôt dépassé par les courants constitutifs de son discours, courants issus des mouvements sociaux tels le féminisme, l'écologisme, le pacifisme, mouvements dont l'existence n'est certes pas à démontrer, mais qui ont surgi en dehors de la problématique luttes de classes-question nationale des années 1960-1980. Autant la référence à une forme de marxisme et à divers courants de la gauche française a pu imprégner la trajectoire idéologique de la réflexion intellectuelle de gauche pendant plus de 20 ans, autant les publications actuelles à la recherche d'idées et de pratiques alternatives, non seulement n'apparaissent plus se réclamer d'une forme quelconque de marxisme, mais surtout apportent les éléments de débat autour de la démocratie voire même d'une certaine forme de libéralisme [39].

Tels sont les termes des formes successives de marxisme qui se sont exprimées au Québec depuis les années 1960 allant du marxisme « décolonisateur » axé sur la primauté de la lutte de libération nationale à un marxisme orienté vers une option de socialisme démocratique à l'affût des mouvements sociaux réels en passant par un marxisme dont la préoccupation majeure de pratique révolutionnaire a abouti paradoxalement à un marxisme dogmatique coupé de la réalité.



[1] J.-M. Piotte, Un parti pris politique, essais, Montréal, VLB éditeur, 1979, p. 14, 16 et 17. [Un livre disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.]

[2] P. Bouchard, « L'idéologie de la revue Parti pris : le nationalisme socialiste », dans F. Dumont et autres, Idéologies au Canada français 1940-1976, tome I, Québec, PUL, 1981, p. 315-353 [Livre en préparation dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.] ; Robert Major, Parti pris, idéologies et littérature, Montréal, Hurtubise H.M.H., 1979, chapitres I et II ; A. Potvin, L'alliée-nation de l'idéologie nationaliste de la revue Parti pris ou pour comprendre le nationalisme québécois, mémoire de maîtrise (science politique), Université « Ottawa, 1971, 377 pages.

[3] « Manifeste 1964-1965 », Parti pris, vol. 2, no 1, septembre 1964 ; voir R. Denis et L. Racine, « Histoire et idéologie du mouvement socialiste québécois (1960-1970) », Socialisme québécois, nos 21-22, avril 1971, p. 50-78.

[4] J.-M. Piotte, op. cit.

[5] R. Denis, Luttes de classes et question nationale au Québec, 1948-1968, Montréal/Paris, PSI/EDI, 1979, p. 523-524 [Un livre disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.] ; voir aussi entre autres, G. Bourque, L. Racine et G. Dostaler, « Pour un mouvement socialiste et indépendantiste », Parti pris, vol. 5, no 8, été 1968, p. 29-35.

[6] Les positions du FLP et du Mouvement syndical politique sont développées dans les cinq livraisons du journal Mobilisation entre 1969 et février 1970, notamment sur les questions de l'analyse de classes et des rapports de classes, du rôle de l'avant-garde révolutionnaire et de ses liens avec le mouvement ouvrier : l'une ou l'autre thèse se préoccupant du seul sort de la société québécoise.

[7] P. Harvey et G. Houle, « Les classes sociales au Canada et au Québec », bibliographie annotée, Cahiers de l'ISSH. Université Laval, Québec, 1979 ; et A. Legaré, « Heures et promesses d'un débat : les analyses des classes au Québec, 1960-1980 », Les cahiers du socialisme, no 5, printemps 1980, p. 60-85. [Texte disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.]

[8] Voir D. McGraw, Le développement des groupes populaires à Montréal (1963-1973), Montréal, Éditions coopératives Albert Saint-Martin, 1978, 184 pages

[9] Voir. P. Hamel et J.-F. Léonard, « Les groupes populaires dans la dynamique socio-politique québécoise », Politique aujourd'hui, nos 7-8, 1978. [Texte disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.]

[10] Mobilisation, vol. 4, no 3, novembre-décembre 1974.

[11] « Début d'un mouvement socialiste à Montréal », Mobilisation, vol. 3, no 1 ; « Deux ans de travail d'un noyau de militants ouvriers et socialistes », Mobilisation, vol. 3, no 2 ; « Le travail idéologique à l'étape actuelle », Mobilisation, vol. 4. no 3, p. 20-25.

[12] « La situation actuelle et nos tâches », Mobilisation, vol. 5, no 1, p. 5.

[13] Le Groupe socialiste des travailleurs (GST). [Voir le texte de Louis Gill, “Le Groupe socialiste des travailleurs (1974-1987.” Texte disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.]

[14] « Organisation et implantation », Mobilisation, vol. 5, no 1, p. 22-23.

[15] Le Mouvement révolutionnaire des étudiants du Québec (MREQ) issu du Parti communiste du Canada (marxiste-léniniste) fondé en mai 1970, publie en octobre 1974 le texte En avant pour la création de l'organisation marxiste-léniniste, Montréal, MREQ, 1974 ; En lutte !, Créons l'organisation marxiste-léniniste de lutte pour le parti, Montréal, supplément au journal En lutte !, décembre 1974 ; LCMLC, Document d'entente politique pour la création de la Ligue communiste (marxiste-léniniste) du Canada, Montréal, 1975.

[16] Voir entre autres, la LCMLC, « Résolution sur la question nationale québécoise », un document du 2e congrès de la LCMLC, Octobre, nos 2-3, 1978, p. 64-106 ; Spécial référendum québécois, Octobre, no 8, printemps 1980 ; En lutte !, Pour l'Unité révolutionnaire des ouvriers de toutes les nations et minorités nationales, contre l'oppression nationale, mars 1978 ; voir aussi En lutte !, Appel aux travailleurs du Québec : ni fédéralisme renouvelé ni souveraineté-association, février 1980, Le Québec a le droit de choisir, février 1980.

[17] M. Désy, M. Ferland, B. Lévesque et Y. Vaillancourt, La conjoncture au Québec au début des années '80, les enjeux pour le mouvement ouvrier et populaire, Éditions La librairie socialiste de l'est du Québec, 1980, p. 102.

[18] Voir entre autres, G. Bourque et N. Laurin-Frenette, « Les classes sociales et l'idéologie nationaliste au Québec 1760-1970 », Socialisme québécois, no 20, 1970 [Texte disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.] ; C. Saint-Pierre, « De l'analyse marxiste des classes dans le mode de production capitaliste », Socialisme québécois, no 24, 1974 [Texte disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.] ; A. Legaré, Les classes sociales au Québec, Montréal, PUQ, 1977 [Livre disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.] ; P. Fournier, Le capitalisme au Québec, Montréal, Éditions coopératives Albert Saint-Martin, 1978 ; N. Laurin-Frenette, Production de l'État et formes de la nation, Montréal, Nouvelle Optique, 1978. [Livre disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.]

[19] Issu des Comités d'action populaire (CAP) et du Front d'action politique (FRAP), le Centre de formation populaire (CFP) a été constitué à l'automne 1970 en vue de produire des instruments de formation politique pour les travailleurs et militants syndicaux.

[20] G. Bourque et G. Dostaler, Socialisme et indépendance, Montréal, Boréal Express, 1980, Introduction [Livre disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.] ; L. Favreau, Le projet socialiste, Montréal, CFP, 1979, 60 pages ; M. Désy, M. Ferland, B. Lévesque et Y. Vaillancourt, La conjoncture au Québec au début des années '80, les enjeux pour le mouvement ouvrier et populaire, Éditions La librairie socialiste de l'est du Québec, 1980, 200 pages ; M. Ferland et Y. Vaillancourt, Socialisme et indépendance au Québec, pistes pour le mouvement ouvrier et populaire, Montréal, coédition : Éditions Socialisme et indépendance, Éditions coopératives Albert Saint-Martin, 1981, 86 pages ; RPS, Le regroupement pour le socialisme, ses orientations, ses interventions, son fonctionnement, Montréal, Éditions Socialisme et indépendance, 1982, 45 pages ; Comité des Cent, Pour un Québec socialiste. Manifeste du mouvement pour un Québec socialiste indépendant démocratique et pour l'égalité entre les hommes et les femmes, Montréal, MS, 1981, 56 pages [Texte disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.] ; J.-M. Piotte, Marxisme et pays socialistes, essais, Montréal, VLB éditeur, 1979, 250 pages [Texte disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.] ; Les cahiers du socialisme (1978-1983) ; Conjoncture politique au Québec (1982...). L'appui critique au Parti québécois prévaut à l'élection du 13 avril 1981, voir Presse libre, no 1, p. 15 ; M. Ferland et Y. Vaillancourt, Socialisme et indépendance, pistes pour le mouvement ouvrier et populaire, coédition : Éditions Socialisme et indépendance, Éditions coopératives Albert Saint-Martin, 1981, chapitre V.

[21] « Les pays du « socialisme réel » et la « crise du marxisme », entrevue avec J.-M. Piotte, Les cahiers du socialisme, no 9, hiver 1982, p. 139. « Dans la mesure où les marxistes québécois ont été en majorité influencés par les marxistes de France, il y a 'crise du marxisme' aussi au Québec. Et c'est aussi fort qu'en France. » Voir aussi J.-M. Piotte, Marxisme et pays socialistes, essais, Montréal, VLB éditeur, 1979. [Livre disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.] « D'où j'écris » ; Idem, Un parti pris politique, essais, VLB éditeur, 1979, Introduction [Livre disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.] ; voir aussi G. Bourque et G. Dostaler, Socialisme et indépendance, Montréal, Boréal Express, 1980, Introduction, p. 9-52. [Livre disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.]

[22] M. Désy, M. Ferland, B. Lévesque et Y. Vaillancourt, La conjoncture, Introduction, chapitres III, IV et V.

[23] L. Le Borgne, « Le PQ à Ottawa. Entre un nationalisme tous azimuts et une gestion provincialiste de la crise », Conjoncture, no 3, printemps 1983, p. 15-23 ; voir entre autres les chapitres I et II de la Conjoncture au Québec et les chapitres II, III, IV et V de la brochure Socialisme et indépendance (1981) sur le Parti québécois et ses démêlés avec la crise constitutionnelle canadienne.

[24] J. Niosi, « La nouvelle bourgeoisie canadienne-française », Les cahiers du socialisme, no 1, printemps 1978 ; Idem, « Le gouvernement du PQ, deux ans après », Les cahiers du socialisme, no 2, automne 1978 ; T. Hentsch et P.-Y. Soucy, « Le Parti québécois et la politique étrangère : un point sur la souveraineté et sa portée », Les Cahiers du socialisme, no 3, printemps 1979.

[25] Entre autres voir G. Bourque, « Petite bourgeoisie envahissante et bourgeoise ténébreuse », Les cahiers du socialisme, no 3. printemps 1979. [Texte disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.]

[26] Comité de rédaction, « Présentation », Les cahiers du socialisme, no 5, printemps 1980, p. 3 ; CFP, « Le référendum, un enjeu politique pour le mouvement ouvrier », Les cahiers du socialisme, no 4, automne 1979 ; M. Ferland et Y. Vaillancourt, Socialisme et indépendance au Québec, chapitre I : La portée du « oui critique » pendant la campagne référendaire », p. 17 et le chapitre II : « Le sens de la défaite du OUI au référendum », etc.

[27] G. Bourque et G Dostaler, Socialisme et indépendance, Montréal, Boréal Express, p. 25 [Livre disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.] ; Les cahiers du socialisme, nos 12/13, hiver 1983. Dossiers sur le Parti québécois, la question nationale. G. Boismenu et al., Espace régional et nation, Montréal, Boréal Express, 1984, 217 p.

[28] Y. Vaillancourt, La position constitutionnelle du MSA-PQ de 1969-1979, et entre autres, Collectif « Parlons tactiques » : « réflexion sur le Parti québécois », Conjoncture politique au Québec, no 1, hiver 1982, p. 11-25 ; et Y. Bélanger, « Le PQ et le renouvellement de la dépendance », Conjoncture, no 1, p. 25-40.

[29] Le RPS, ses orientations, p. 30 : « Le socialisme pour nous c'est la démocratie économique, politique, sociale et culturelle, pas la dictature, même si elle était le fait d'un parti de la classe ouvrière ou ayant cette prétention. »

[30] Extraits de la plate-forme du Regroupement indépendance socialisme au Québec (RISQ) du mouvement ouvrier et populaire de la région de Saint-Hyacinthe dans Le RPS, ses orientations, Éditions Socialisme et indépendance, 1982, p. 23 : « Il faut reconnaître plusieurs organisations politiques qui peuvent concourir à la construction du projet socialiste : leurs débats peuvent enrichir le processus d'édification d'une société nouvelle dans le sens des intérêts des classes populaires ».

[31] Idem, p. 30, MS, Manifeste, p. 45. Voir « À propos des malaises actuels du mouvement socialiste », Conjoncture, no 4, automne 1983, p. 7-13.

[32] G. Bourque et G. Dostaler, Socialisme et indépendance, p. 52. [Livre disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.]

[33] J.-M. Piotte, Un parti pris politique, essais, VLB éditeur, 1979, p. 28 [Livre disponible dans Les Classiques des sciences sociales. JMT.] ; « L'inexistence d'un modèle révolutionnaire historique ne saurait cependant justifier... l'abandon de la recherche des chemins de l'espoir. » Et entre autres G. Bourque et G. Dostaler, op. cit., p. 42, et 44.

[34] Le RPS, ses orientations, Éditons Socialisme et indépendance, 1982, p. 43.

[35] G. Bourque et G. Dostaler, op. cit., p. 50.

[36] « ... tous ces hommes et ces femmes que l'on prive de tout contrôle collectif sur leurs milieux de travail et de vie... formant ensemble la base sociale d'une nouvelle force politique à construire pour transformer en profondeur la société québécoise » (Manifeste, p. 7).

[37] « Cette société différente que nous voulons, n'existe-t-elle pas déjà en pièces détachées, dans plusieurs de nos revendications et de nos luttes ... ? », Le RPS, Ses orientations, p. 27.

[38] Voir H. Hamon et F. Rotman, la deuxième gauche, Paris, Éditions Ramsay, 1982 ; et entre autres, « Glissements idéologiques : deuxième gauche, deuxième droite », dans Esprit, no 12, décembre 1983, p. 40-65.

[39] Entre autres, D. Brunelle, « L'État contre la démocratie » dans Les cahiers du socialisme, nos, 12-13, 1983 ; J.-T. Godbout, La participation contre la démocratie, Montréal, Éditions coopératives Albert Saint-Martin, 1983,190 pages.



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le dimanche 6 février 2011 10:36
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie retraité du Cégep de Chicoutimi.
 



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