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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Jean-Paul Desbiens, DOSSIER UNTEL (1973)
Introduction


Une édition électronique réalisée à partir du livre de Jean-Paul Desbiens, DOSSIER UNTEL. Montréal: Les Éditions du Jour, 1973, 329 pp. Collection: Les cahiers de Cap-Rouge. Une édition numérique réalisée par ma grande amie de longue date, Gemma Paquet, professeure de soins infirmiers retraitée de l'enseignement au Cégep de Chicoutimi. [Autorisation accordée par l'auteur le 20 janvier 2005 de diffuser la totalité de ses publications.]

Introduction

LE FRÈRE UNTEL
HIER ET AUJOURD’HUI

par Rosaire Bergeron

Intituler une étude Le Frère Untel hier et aujourd'hui c'est m'engager en une aventure complexe et exigeante. En septembre 60, qu'on s'en souvienne ou non, paraissait un ouvrage-choc : Les Insolences du Frère Untel. [1] Je me propose, non seulement de rappeler certains faits, l'impact produit et ses causes, mais surtout de rechercher où nous en sommes aujourd'hui avec les problèmes soulevés alors. En outre, je tenterai de cerner quelque peu le rôle que l'auteur assume, par ce livre et ses divers écrits, dans l'évolution québécoise actuelle.

Sans quémander une indulgence à bon marché, je déclare tout net que j'aurais désiré plus d'heures disponibles pour rédiger ce travail. J'ai composé à la façon d'un journaliste étreint par l'urgence : chacun sait ce que ça donne. Rousseau avait bien raison de s'indigner de ce que les pires choses arrivent au meilleur des hommes. Mais enfin, pour les déficiences de cet exposé, je ne présente aucune excuse et ne sollicite aucune pitié. Semblable au Cimetière marin de Valéry, ma conscience se berce en moi, tranquille mer, "chienne splendide sans pareille." Ni dupe, ni coupable ! Voilà comment je m'éprouve au seuil de cette épreuve.

J'ai fait effort pour me dégager d'un horizon trop étroit. De nombreuses références expliquent, nuancent ou prolongent les idées émises. Je signale ici, qu'en mes écrits, les renvois, les notes additionnelles éclairent plus que le texte. C'est. ma façon à moi d'être original.

Impact des Insolences

Je débute par un souvenir personnel. Un samedi de mi-septembre de l'année 60, je me rendais à la Librairie Régionale de Chicoutimi pour acheter des volumes scolaires. Sur le rayon supérieur, un livre attira mon attention par sa couverture : un religieux en rabat blanc qui donnait un coup de pied à une boîte de conserves ouverte sur laquelle on lisait : BINES. Sur la page brune se détachait : Les Insolences du Frère Untel. J'en parlai au libraire. Il me répondit que ce livre venait de sortir des presses et que la maison avait risqué l'achat de quelques exemplaires, au cas où ça se vendrait. Mais ce nouveau-né devait connaître une destinée tout à fait singulière. Rapidement il fit parler de lui dans plusieurs revues et journaux. Les commentaires se multipliaient, tantôt modérés [2], souvent enthousiastes, parfois hostiles.

Mais l'ouvrage se vendait à un rythme inhabituel : 50,000 exemplaires pendant les trois premiers mois. Dans Le Devoir du 5 novembre, on lisait : "Jamais, semble-t-il, un livre n'a connu un succès semblable au Canada français. Des maisons d'édition allemande, américaine, anglaise et sanglo-canadienne ont entamé des pourparlers avec la direction des Éditions de l'Homme pour obtenir des droits de reproduction et de traduction". [3]

Pour répondre aux demandes successives, on dut réaliser vingt-huit éditions françaises totalisant 130,000 exemplaires. Le public anglais exigea cinq éditions totalisant 15,000 exemplaires. Il faut noter que la traduction anglaise ne fut réalisée qu'en 62. Déjà plusieurs anglophones avait lu le texte français. Sur sept listes de best-sellers en 60, les Insolences figurent en première place. L'auteur lui-même soulignait, cinq ans plus tard : “ ... il est objectivement vrai de dire que je fus, pendant un an, le plus connu et le plus discuté des Canadiens français”. [4] Il devint célèbre soudainement et ne pouvait plus rester dans, l'anonymat.

On l'invita à l'émission Premier plan en novembre 60. Le Frère Untel-Desbiens s'expliqua avec la verve et l'humour qu'on lui sait. Cette apparition de quarante-cinq minutes sur l'écran augmenta encore son prestige. [5] Il reçut le prix Liberté l'année suivante. [6] Et les demandes de conférences se multipliaient. Mais l'auteur, réduit au silence, savourait de façon bizarre la sage maxime : Pour vivre heureux, vivons cachés.

Toutefois, cet accueil des Insolences comprend des formes variées. Ainsi plusieurs Religieuses eurent difficilement accès à cet ouvrage. La Lettre de Soeur Une Telle choqua un certain nombre de Supérieures. Cependant maintes soeurs savourèrent en cachette le fruit défendu et convoité. J'enseignais cette année-là à l'école Saint-Alphonse de Bagotville. Une jeune religieuse emprunta discrètement notre exemplaire, nous recommandant avec force de n'en rien dire à personne. Elle le lut, puis le passa, on devine comment, aux vingt-deux soeurs du couvent. Le livre, il fallait s'y attendre, finit par tomber dans les mains de Mère Supérieure qui nous le rapporta en assurant que le "Frère Untel a dit des choses vraies et intéressantes."

Les Frères, pour l'immense majorité, réservèrent un accueil fort positif à l'ouvrage. Chacun se retrouvait plus ou moins en ces pages sympathiques et familières. Je me souviens de cette réflexion de mon Provincial d'alors, homme réservé, mais d'un jugement accompli : "Le Frère Untel, tout ce que je lui demande, c'est de rester en communauté. Il vient de nous rendre le plus beau témoignage jamais écrit sur nous." Pour ma part, je fus envoûté par le style et l'humour de l'auteur. Le pittoresque coulait à pleins bords. Je m'étonnais de ces formulations hardies, de ces expressions neuves et crues d'où giclait la lumière. Ce qu'il disait sur l'enseignement du français, nos programmes scolaires et le Département de l'instruction publique, me paraissait juste. Mais je le trouvais terriblement audacieux de parler comme ça et j'ai pensé : "Il va se faire ramasser de la belle façon !" En ce qui regarde la crise religieuse et l'impasse de la pensée canadienne-française, il m'ouvrait les yeux ; ça m'avait échappé. Mais ce qui m'impressionna davantage ce fut la Lettre à un jeune Frère. J'éprouvai l'impression que l'auteur me parlait à moi, et qu'il m'était tout présent. Ces lignes m'apportèrent une grande paix. Après Les élus que vous êtes du frère Clément Lockquell, ce témoignage limpide confirmait "les voix" qui, à treize ans, m'avaient poussé vers le juvénat d'Arthabaska. Comme le cheval de la fable, je me découvris sur un "chemin montant, sablonneux, malaisé" ; j'empruntais une voie méconnue du clergé en général, des parents et des élèves, et même méprisée par une partie de ce qu'on appelle l’“élite” de la société. Ma vocation de vivre Jésus-Christ parmi les humbles, m'apparut dans son austère beauté. Être Frère du Sacré-Coeur, ça en valait le coup ! Il me fallait tenir. Et, malgré le froid de la nuit, rester au poste avec mon option sur Dieu. [7]

En milieu ouvrier, les Insolences connurent une popularité qui valut à l'auteur d'émouvantes confidences de ce genre :

"Frère Untel, vous êtes notre ami !"

"Votre livre, Frère Untel, répondait à un besoin, surtout chez les pauvres ouvriers."

"Bravo Frère Untel ! nous avons lu votre livre avec beaucoup de comprenure !"

"Frère Untel, je vous aime encore plus que Maurice Richard." [8]

Les membres du clergé ainsi que des professions libérales se montrèrent, dans l'ensemble, plutôt silencieux. Les témoignages furent plus rares, quoique là encore on retrouve des prises de position modérées, positives ou discordantes. Parfois sous forme voilée, parfois en termes incisifs, on reprochait à l'auteur de favoriser l'anticléricalisme naissant [9] ou encore de saper nos institutions sans apporter de solutions de rechange [10] ou même de jeter de la dynamite dans le peuple. [11] En bref, les Insolences furent un signe de contradiction.

Causes de l'impact

Pourquoi l'impact fut-il si considérable ? L'auteur répond : "J'étais un frère enseignant. On n'était pas habitué à les entendre ceux-là. Les entendre moquer, oui, mais les entendre parler eux-mêmes, non. Voilà, il me semble, les ingrédients de ce succès". [12] Le 5 novembre 60, La Presse avait exprimé ce point de vue presque textuellement. [13] En outre, l'ouvrage décrivait des malaises réels. L'évidence même de ce que l'auteur dénonçait le rendait sympathique et redoutable à la fois. [14]

C'est ainsi que le thème de la grande peur québécoise a rencontré des échos profonds dans les diverses classes de la société [15], mais surtout chez les étudiants, semble-t-il.

Le succès de l'ouvrage s'explique encore, en partie, par une certaine agressivité amicale dans l'attaque, les images inattendues, les tours hardis, la bonhomie de la phrase et cette sensation de santé mentale que l'on retrouve dans chaque page. [16] Mais on apprécia particulièrement la sincérité et l'attitude positive de l'auteur qui affirmait : "Ce que je veux, c'est créer un appel d'air ; je veux qu'on respire ici." [17] Enfin, les media d'informations contribuèrent pour une part à créer ce climat d'attention autour des Insolences par une publicité soutenue, bruyante même. Radio-Monde alla jusqu'à affirmer le 19 novembre 60 : "Les Insolences du Frère Untel a produit chez nous autant de bouleversement qu'en avait suscité Hiroschima !" Et dire que ce livre à succès résultait de quelques lettres à M. André Laurendeau, journaliste au Devoir. [18]

Les thèmes des Insolences

Maintenant, je préciserai sommairement les thèmes cardinaux de cet ouvrage. Ils portent sur l'état du langage québécois, notre système d'enseignement, l'impasse de la pensée canadienne-française et la crise religieuse. Considérons de près l'analyse faite alors sur ces diverses situations, et tâchons de voir où nous en sommes aujourd'hui avec ces problèmes.

Le langage québécois

L'auteur s'en prend d'abord au langage. Une nouvelle langue se développe chez nous : le joual. C'est un parler désossé, une décomposition fort difficile à définir. [19] Cet état de choses s'aggrave sans qu'on y prenne garde ; on s'y habitue ; c'est une sorte d'asphyxie progressive, sournoise. Le Frère Untel rapporte les difficultés qu'il éprouve à motiver ses élèves pour parier un français correct. Quelqu'un répond : "Pourquoi se forcer pour parler autrement, on se comprend." [20] Et l'auteur ajoute : "Bien sûr qu'entre jouaux, ils se comprennent. La question est de savoir si on peut faire sa vie entre jouaux." [21] Le langage et l'écriture malades révèlent une pensée malade, une anémie culturelle. La crise du langage signifie notre pauvreté d'existence. "Notre inaptitude à nous affirmer, notre refus de l'avenir, notre obsession du passé, tout cela se reflète dans notre joual, qui est vraiment notre langue." [22] Il s'impose alors d'attaquer le mal à sa racine : soigner notre âme. Car il existe une corrélation entre le langage, la pensée et la vie. "Nous vivons joual par pauvreté d'âme et nous parlons joual par voie de conséquence ." [23]

L'auteur précise, qu'en pourchassant le joual, il n'entend pas nous ramener au français impersonnel dominé par une grammaire formaliste. Nous sommes des Français québécois ; tenons compte de nos particularités historico-culturelles. S'il importe de nous ressourcer à la France, il faut intégrer aussi l'apport original de nos ancêtres vivant depuis trois siècles et demi en terre d'Amérique. [24]

Des mesures immédiates s'imposent pour l'amélioration de notre langage. Les Insolences suggèrent des mesures radicales, efficaces [25] ; et d'abord l'intervention des pouvoirs publics. "L'État québécois devrait exiger, par loi, le respect de la langue française, comme il exige, par loi, le respect des truites et des orignaux." [26] Car la langue fait partie intégrante du bien commun. [27]

Cet appel ne se perdit point dans l'indifférence. Un réveil étonnant se produisit bientôt dans plusieurs couches de la société québécoise. Ainsi, plusieurs municipalités envoyèrent des lettres officielles de félicitations au Frère Untel pour son cri d'alarme et promirent d'apporter remède à la situation selon leurs moyens. Des vedettes de Radio-Canada et des écrivains se remirent en question. Plusieurs journaux et revues entrèrent dans la ronde pour abattre le joual. [28] Un courant anti-joual se répandit un peu partout. Maints journaux signalèrent l'ampleur de cette prise de conscience populaire [29] qu'il fallait retrouver un meilleur langage coûte que coûte.

Diverses initiatives surgirent ici et là, pour refranciser les milieux de travail ou de vie. Des hommes d'affaires prirent des mesures concrètes [30] pour valoriser le français dans le commerce et l'industrie. Des professeurs mirent sur pied des examens spéciaux destinés à encourager un parler correct, voulant par là soutenir l'effort des élèves. Même l'université Laval prit part à ce mouvement collectif, selon sa manière à elle. [31] Mais cette ferveur du début ne se maintint pas partout ; il fallait s'y attendre. Tout de même, des progrès consolants apparurent et encouragèrent de nouveaux départs. [32]

Mais en 73, qu'en est-il de notre parler ? On s'accorde pour reconnaître un progrès tangible sur ce point par rapport aux années 60. Le peuple parle mieux ; les enfants parlent mieux. Le vocabulaire est plus exact et plus varié. Tout n'est pas parfait, loin de là ! ce qu'il faut souligner toutefois, c'est qu'on a fait du chemin. Il faut s'en réjouir et surtout, poursuivre notre effort à tous les niveaux. Au niveau politique d'abord, le gouvernement doit assumer de plus en plus un rôle positif en cette promotion de la langue parlée dans les diverses sphères du travail et de la culture en accordant un appui à la fois financier et législatif. La télévision, la radio et les enseignants contribuent largement à l'amélioration de notre parler chez les jeunes. Leur collaboration sera toujours requise.

Il y a quelques semaines, M. Desbiens me confiait qu'il mesurait le progrès en ce champ du langage, à la lumière de trois situations. Il signale d'abord l'élévation du niveau de scolarité qui, en fin de compte, représente un acquis brut non négligeable. Ensuite, il constate que le problème du français se situe maintenant plus haut, au niveau politique. Le gouvernement se sent obligé d'en tenir compte davantage. Enfin, il salue l'explosion de la parole qui se manifeste dans le théâtre, la chanson et le roman. Une vitalité littéraire étonnante ! Pour ma part, je partage ces vues.

Si le français parlé accuse une amélioration sensible, le français écrit connaît des difficultés croissantes. Beaucoup d'élèves écrivent au son, même à la fin du Secondaire. Imaginez les ambiguïtés, les couleurs locales en certaines copies ! Quoi faire ? Le Frère Untel nous répondrait peut-être : mes petits enfants, il serait efficace de surveiller, de rémunérer l'orthographe et la syntaxe de tous les travaux exécutés par vos élèves. En outre, une étude poursuivie de la grammaire me paraît indispensable. Faire copier des extraits littéraires de valeur, et même les faire mémoriser peut rendre de précieux services. Apprendre à penser et à écrire en français, représente une tâche fort onéreuse, exténuante même ; mais si nous voulons civiliser nos jeunes barbares, il faut payer ce prix.

L'auteur des Insolences ne pense pas que chez nous tout aille pour le mieux avec la meilleure des langues. En ses interventions, il revient fréquemment sur ce problème pour nous tenir en alerte. [33] On n'a qu'à relire les six articles publiés en ce volume sous la rubrique La langue. L'entreprise de 60 est poursuivie, car il lui paraît qu'on ne peut libérer un peuple qu'en libérant sa parole. En effet, la parole permet la relation au niveau typiquement humain. Et l'homme ne peut atteindre la maturité que dans une communion interpersonnelle.

Notre système d'enseignement

La crise de l'enseignement du français résultait, pour une part, selon l'auteur des Insolences, de l'incompétence du Département de l'Instruction publique. [34] Cet organisme aurait été créé d'abord pour éviter l'anglicisation et le glissement au protestantisme : « le Département a été conçu comme une machine à évitement ; un tuyau d'échappement. » [35] De ce manque d'objectifs plus précis, serait née la dichotomie entre l'enseignement privé et le cours public. Le Département se serait préoccupé suffisamment des collèges classiques, mais aurait délaissé l'enseignement secondaire où des professeurs se débattent sans préparation suffisante, sans programmes, sans manuels appropriés. [36] Le Département recevait, en outre, le reproche d'improviser en des secteurs où il s'imposait de planifier. Les enseignants se faisaient vertement conseiller d'apprendre quelque chose avant d'instruire les autres. [37] La solution proposée : envoyer les professeurs à l'école et fermer le Département. [38]

Aujourd'hui, en 73, où en sommes-nous en ce qui concerne ces points ? Le ministère de l'Education a été mis sur pied. Le Rapport Parent nous est arrivé comme un nouvel Emile destiné à renouveler l'école. Des centaines de théories furent émises. Des centaines de comités se mirent fébrilement à l'oeuvre. Des millions d'heures et de dollars ont été engloutis dans la réforme scolaire. Et les fruits ? C'est difficile de répondre. Car ils sont en train de se faire. Certains affirment que ça mûrit ; d'autres que ça pourrit. Comme il s'agit, en fait, de deux propositions particulières, elles peuvent être vraies toutes deux en même temps : il y a des fruits qui mûrissent et d'autres qui pourrissent.

Dans un exposé substantiel [39], M. Desbiens souligne que l'objectif global du ministère de l'Éducation en 60 consistait dans la démocratisation de l'école. Les moyens utilisés pour atteindre ce but se résumaient à ceux-ci : 1-l'organisation des compétences au sein du ministère de l'Éducation ; 2- création d'écoles polyvalentes ; 3- les enseignants.

Il souligne que ce dernier facteur, le plus important, s'est révélé décevant. Le bilan s'établirait ainsi. L'objectif global, la démocratisation de l'école a été substantiellement atteint. Mais, selon M. Desbiens, certains moyens ont été transformés en buts : la participation ou consultation, la polyvalence, les programmes, les horaires, etc. « On croit multiplier les services en multipliant les fonctionnaires et les organigrammes. » [40] Malgré tout, cette immense aventure nous aurait permis une avance considérable en tant que société. Pour sortir des malaises actuels, l'auteur préconise une décentralisation. Que le ministère abandonne ou plutôt établisse les pouvoirs de décision sur les champs concrets où se posent les problèmes. En outre, que l'école soit davantage ouverte sur la vie pour une rencontre des générations. À diverses reprises, il suggère des voies pour débloquer les impasses. [41]

Il constate sereinement les maux présents qui résultent de la réforme scolaire et reconnaît que nous ne voyons pas clairement encore les solutions appropriées. [42] À mon point de vue, si les difficultés s'accumulent à tous les niveaux : gouvernement, enseignants, élèves, parents, en ce qui concerne l'école, c'est, pour une bonne part, que cette réforme a été menée trop rapidement ; on a brûlé des étapes essentielles pour arriver aux objectifs présentés comme des urgences. Ainsi, on a changé brusquement les structures scolaires avant de créer ou de préparer la mentalité requise pour s'adapter aux situations nouvelles. Il s'imposait de sensibiliser les parents, les professeurs, les commissions scolaires, aux objectifs à poursuivre en regard de leur situation concrète d'alors. On les aurait ainsi rendus capables d'une participation intelligente et consentie aux diverses phases du renouveau. Mais on a choisi de leur passer pardessus la tête pour des raisons d'efficacité et de célérité. Le ministère de l'Éducation est devenu une machine à tout décider. Cette situation doit cesser ; autrement, nous retournerons au bon vieux Département du Frère Untel.

La crise religieuse

Les Insolences diagnostiquaient un malaise religieux non apparent mais réel et croissant. Les symptômes : une religion de surface chez plusieurs ; un juridisme desséchant ; un hiatus entre la foi du dimanche et le comportement journalier, l'indifférence croissante des jeunes envers la religion et leur mentalité étrangère au christianisme. [43] Notre enseignement religieux semblait tourner à vide. Ici encore, un constat d'échec. Si aucune solution n'était proposée, certains rappels étaient risqués : le Saint-Esprit importe plus que le Droit Canon, l'exercice évangélique de l'autorité libère et donne de la joie. [44]

Et aujourd'hui ? La crise religieuse paraît s'aggraver sous certains aspects. Quelques-uns désespèrent et jettent les bras au ciel, d'autres sont inquiets et ne savent vraiment plus où l'on s'en va. Le renouveau catéchétique est contesté. M. Desbiens me disait récemment que la situation religieuse paraît aussi mal en point qu'au temps des Insolences, mais qu'au moins, on ose regarder les choses en face sur ce point. De plus, si le christianisme sociologique s'effrite, ce qui entraîne des défections nombreuses en certains milieux, on assiste, en même temps, à un renouveau de la foi vécue au plan de l'engagement responsable tant personnel que communautaire. Le bilan apparaît positif en des aspects essentiels.

Influence des Insolences sur l'évolution québécoise.

Les Insolences coïncident avec le début de notre révolution non sanglante. Dans quelle mesure ce petit livre a-t-il amorcé, nourri, orienté notre évolution jusqu'à 73 ? Lorsqu'on veut poser une question à laquelle chacun trouve une réponse contestable, c'est exactement ce type de question qu'il faut soulever. Car, dans le terrain de l'histoire, toujours de multiples et imperceptibles facteurs sont à l'oeuvre. Je risque quand même un diagnostic. En ce qui concerne l'amélioration du langage, les Insolences me paraissent avoir joué un rôle assez considérable. Ce fut une prise de conscience en profondeur qui a duré et porté des fruits. En ce qui concerne notre réforme scolaire, je crois que cet ouvrage a accéléré le processus : création du ministère de l'Éducation, parution du Rapport Parent, mise sur pied de nouvelles structures scolaires, renouvellement de la pédagogie, etc. Les Insolences signalaient la stagnation de notre pensée. Nous vivons maintenant un renouveau assez spectaculaire, affirme M. Desbiens. Nos écrivains, chansonniers, cinéastes, politicologues, économistes, sociologues et psychologues, scrutent, chantent, peignent, analysent la réalité québécoise, l'homme d'ici, avec une ferveur parfois naïve, mais souvent émouvante. Je me sens incapable de délimiter la responsabilité des Insolences en ce champ. Quant à la crise religieuse dénoncée en 60, l'auteur constatait des malaises mais ne suggérait pas de solution précise.

Le Frère Untel a-t-il évolué ?

Mais en 73, demandera-t-on peut-être, l'auteur récrirait-il son livre de la même façon ? Bien sûr que non. Car il n'est plus le même, sous certains aspects ; et la réalité également a changé. Il possédait alors peut-être plus d'audace candide, plus de facilité pour simplifier (au sens péjoratif du terme) les problèmes auxquels il s'attaquait. Du « lapin bleu » dont parlent les Insolences, je dirais, pour utiliser une image du même registre, qu'il s'en va vers l'âne gris. Notez ici que je mets l'accent sur le mot gris, synthèse du noir et du blanc. M. Louis-Philippe Audet disait en 60 que le Frère Untel s'adoucirait avec les années, que même il se repentirait. [45] Il faut s'entendre. Vivre, pour une personne, c'est croître, ce qui suppose des ruptures dans une continuité, des approfondissements dans une fidélité. Quand je lis les écrits actuels de M. Desbiens sur les problèmes abordés en 60, je découvre les mêmes orientations fondamentales, les axes de référence fonciers se retrouvent identiques. Mais des nuances apparaissent qui étaient absentes alors ; des perspectives changent de ton. Une certaine évolution devait se produire chez notre homme ; il n'y a pas à s'en surprendre. Malgré le style fougueux du début, M. Desbiens ne m'a jamais paru un Don Quichotte parti pour la gloire et voulant à tout prix livrer bataille aux moulins à vent, aux troupeaux de moutons ou aux lions déjà encagés. Il me rappelle plutôt ce « cavalier parti d'un si bon pas » que chante Péguy.

Un homme présent à notre réalité politique

M. Desbiens continue de participer à notre devenir collectif. La réalité économique retient son attention : le pain, c'est une question de justice. Mais surtout, le problème politique du Québec le préoccupe de plus en plus, à cause de ses implications culturelles. [46] Aux jeunes de Parti pris qui posent des bombes, il propose des professeurs. Notre révolution doit se faire au niveau de la culture tout d'abord. Nous vivons à une époque où la compétence est exigée pour jouer un rôle efficace. « Cul sur chaise », les enfants ! Et à l'étude ! Ce sera plus efficace que de se défouler sur les Anglo-Canadiens. « Notre révolution politique et économique, elle passera par la révolution scolaire. » [47] Toutefois, il reconnaît que la somme des compétences individuelles ne suffit pas. La culture exige un encadrement politique adéquat pour s'épanouir. Suivant de près l'évolution de nos rapports avec Ottawa, il lui apparaît, maintenant du moins, que l'indépendance du Québec favoriserait davantage notre culture originale. Selon M. Desbiens, nous n'irions pas ainsi vers moins de souffrance, mais vers plus de dignité. [48] Il explique son cheminement vers cette option en un article pondéré : La fidélité. [49] Chacun affronte une destinée singulière ; certains toutefois assument une mission plus responsable, plus universelle. Et selon qu'ils sont fidèles ou non, le sort de beaucoup devient tout autre. Il semble que celle de M. Desbiens soit d'épouser plus profondément le Québec des années ambiguës que nous traversons. Il a été, sans l'avoir voulu, une occasion privilégiée du grand déblocage qui a commencé vers 60. [50] Il Puis, la grande aventure l'a happé. Il a dû assumer des responsabilités de premier plan au ministère de l'Éducation, en une période où se décidait l'avenir de la réforme scolaire. Ensuite, on le retrouve éditorialiste à La Presse où le surprendra notre historique Octobre 70. En cette circonstance critique, où plusieurs se sentaient nettement dépassés par les événements, il fut une voix claire et ferme. [51]

Depuis une année, il est revenu à ses « premières amours » : l'éducation des jeunes. [52] Mais sa présence sociale s'amplifie et déborde largement le milieu de Notre-Dame-de-Foy de Cap-Rouge.

En 65, il écrivait : « Trois problèmes majeurs, en ces années-ci : vivre, s'instruire et savoir pourquoi. C'est le problème politique et, indivisiblement, économique ; le problème scolaire et le problème religieux. » [53] Les perspectives ouvertes se précisent, et se complètent en de denses articles ici publiés et qui nous montrent les intuitions initiales de notre homme, mais engagées dans le dynamisme de notre mouvante réalité. Ce sont les événements qui font démarrer notre penseur. Les grèves, l'attitude des syndicats et du gouvernement dans les conflits de travail, les dangers qui menacent notre démocratie, le terrorisme, les écoles en difficulté, la détresse de certains jeunes, le déclin de nos institutions, nos traditions religieuses remises en question, autant de thèmes sur lesquels portent ses analyses savoureuses. [54] Mais Québec ce n'est pas le monde. Aussi, notre auteur, de plus en plus, prête sa plume aux événements internationaux ; il ouvre une fenêtre sur les pays des hommes. [55]

L'homme Untel-Desbiens

Entre un homme et son oeuvre, il existe un rapport profond : l'oeuvre renvoie à l'homme qu'elle révèle partiellement. Mais l'homme déborde toujours son oeuvre : l'on ne peut jamais le définir exhaustivement par ses réalisations, ses accomplissements. Et c'est heureux qu'il en soit ainsi ; autrement certains de nos contemporains perdraient toute définition. Mais en bonne philosophie aristotélico-thorniste, ils peuvent toujours se croire des « animaux raisonnables », même s'ils ne font rien du tout, même s'ils n'ont jamais rien fait, alors qu'ils pourraient travailler. Cette consolation philosophique ne suffit certes pas pour rendre un oisif pleinement satisfait, mais enfin, on prend ce qu'on trouve, comme le héron de la fable.

1- Comprendre pour ordonner

Rapidement, je voudrais cerner quelque peu l'homme Desbiens afin de faire mieux saisir le sens caché de ses divers engagements et de son oeuvre écrite. Je dirai en premier que cet homme m'apparaît comme exigeant de clarté. Rationnel ? Si l'on veut, mais non désincarné. Voir clair, pour lui, ce n'est pas enfiler des syllogismes corrects, c'est être debout, en état de veille, présent tout entier à la vie. Déjà Les Insolences mettaient en relief ce souci de lutter contre la confusion régnante, contre le silence, complice de cette confusion. Dans son autobiographie, Sous le soleil de la pitié [56], l'auteur, en termes discrets mais émouvants, nous parle du drame de son père « vieux prisonnier ayant vécu à tâtons toute sa vie » [57], et ajoute : « Si j'ai voulu être professeur... c'est peut-être pour qu'il n'y ait plus, dans la mesure où cela dépend de moi, personne qui vive à tâtons ; c'est peut-être pour délivrer les captifs. » Et encore : « Expliquer, expliquer, c'est ma passion, c'est ma vie. Déplier les choses, déplier les hommes, les mettre debout. » [58] Et cette passion de connaître et d'expliquer s'enracine dans le goût de la liberté. « Le langage de la raison est austère, mais il conduit à la liberté qui n'est jamais plus grande que notre connaissance. » [59] Pour agir efficacement, pour avoir prise sur le réel, il faut connaître. Surtout, notre grandeur d'homme réside en ce point : y être fidèle donne d'inépuisables satisfactions : toujours « il faut comprendre, la seule chose dont on ne se lasse jamais ». [60] Ce goût de l'ordre, de la rigueur conceptuelle, de la méthode, se manifeste avec évidence en ses diverses initiatives. Voir la réalité plutôt que nos idées sur la réalité, importe à ce réaliste penseur. Mais chez lui, la connaissance se veut existentielle, intégrée, doublée d'affectivité et d'humour. Thomas d'Aquin, Pascal, Alain, Chesterton et Saint-Exupéry se retrouvent quelque peu en notre auteur. Je ne saurais nuancer si ces penseurs germent en lui plutôt par parenté d'âme que par greffe culturelle.

C'est avec cette hantise de clarté qu'il affronte la réalité sociale. Pour une part, les remèdes sociaux consistent à définir les plans, à détecter les malentendus, à établir les priorités, à mettre en lumière les droits et les devoirs de chacun. Quand on patauge dans le sentimentalisme bébête, on reste divisé, on avance à rien. Et c'est notre drame : « Avec tant de monde qui parle de justice, qui se préoccupe de justice, cette dernière devrait se porter assez bien. On sait qu'il n'en est rien. C'est que la justice est affaire de raison et que nous brassons les émotions à la pelle dans cette québécitude où nous sommes tous emprisonnés. » [61] Et pourtant, « c'est l'extrême lucidité, qui suppose l'extrême courage, qui nous sauvera. » [62]

C'est cette conviction qui l'anime lors de ses interventions dans les divers conflits entre les corps intermédiaires et l'État. Il insiste sur ce point que « la démocratie est une conquête de la raison » et que si l'on veut nager dans l'irrationnel au nom de la démocratie, on risque une déconfiture. [63] La démocratie suppose encore la confiance dans le citoyen ; elle exige qu'on écoute l'autre jusqu'au bout, mais aussi qu'on se prononce. « Car soi aussi, on est un citoyen. Et non pas une fonction. » [64]  Ce dialogue difficile s'impose pour la survie même de la civilisation, car « quand les gros ne s'entendent pas, c'est les petits qui meurent. » [65]

La parole de M. Desbiens aux Québécois se veut limpide et efficace. Pour le mesurer, en ce qui regarde la crise d'octobre 70, par exemple, on n'a qu'à relire Le terrorisme, La veille d'un homme, L'anarchie ou la démocratie, Appel aux québécois, Une société à refaire. De semblables prises de position lui ont attiré des blâmes et des ennuis, mais aussi lui ont valu de devenir un homme-repère pour certains.

Non seulement, l'émotionnel où nous nous complaisons, mais aussi le manque d'objectivité nous égarent souvent et entraînent de douloureux conflits. Il n'échappe à personne que, dans le chaos actuel où les théories les plus opposées se heurtent âprement en ce qui touche les fondements même de la civilisation : amour, famille, liberté, État, religion, ce qui manque cruellement, c'est la soumission à des normes objectives. Je peux, en toute honnêteté, croire et affirmer que les rhinocéros ont des queues roses et qu'ils chantent clair. Mais si ma voisine soutient le contraire (et que ma voisine détient un doctorat en plus !), qui va trancher le débat entre moi et elle ! Rien d'autre que les rhinocéros. En rhinocérologie, le dernier moi leur revient ; aucun doute là-dessus. Ils n'ont qu'à lever leur queue et à ouvrir leur gueule pour chanter, et ça me mettra d'accord (en harmonie, c'est le cas de le dire !) avec ma voisine. Tout cela pour signifier que la vérité, ce n'est pas nécessairement ce que l'on pense ou que l'on écrit ; la vérité, c'est ce qui est. Beaucoup de contemporains, notamment les intellectuels, auraient besoin des rhinocéros pour les basculer dans la vérité.

Chez notre penseur, la vérité ne coïncide pas avec la logique, mais elle exige l'accord de soi avec la réalité, le raccord des principes et des actes. Il ne s'agit pas de défendre ses petits intérêts, mais d'être cohérent avec ses valeurs. L'hypocrisie, le mensonge, voilà ce qui complique la vie en société. Parlant du Canada et d'autres pays qui, d'une part, font le commerce des armes et, d'autre part, élèvent la voix contre la guerre et les massacres qui, souvent, se font avec ces armes, il poursuit : « Tout le monde est logique, mais personne n'est cohérent. Une simple remarque, tout au plus : si j'étais capable, je te fermerais le monde demain matin et j'en ouvrirais un autre, où il n'y aurait qu'une seule règle : défense de mentir. » [66] En effet, la liberté consiste à ne pas mentir.

Je me permets ici une suggestion pour régler la question sociale qui préoccupe M. Desbiens. Au fond, il n'existe qu'un problème : celui de l'inflation. Nous souffrons de l'inflation verbale, de l'inflation monétaire et de l'inflation érotique. Eh oui ! Les livres et les bouches sont pleins de mots qui désobéissent au réel ; les banques sont pleines de dollars qui trichent les choses, et les films sont pleins de femmes-objets qui miment l'amour. Pour enrayer ce fléau, je propose que le plus grand nombre possible de citoyens des deux sexes entre vingt et cinquante ans émettent et vivent les voeux d'obéissance, de pauvreté et de chasteté, jusqu'à ce que l'équilibre soit rétabli. On rendrait bougrement service à la culture, au Gouvernement et à l'Église par surcroît. Trois pierres d'un coup !

2- L'appel des humbles

Un second trait qui me semble dominer en l'homme Desbiens, c'est le souci des défavorisés aux divers niveaux. Les ignorés, les écrasés retiennent particulièrement son attention. C'est très net. André Laurendeau l'avait déjà remarqué en 60. [67] Les années passées à la maison paternelle et dans la communauté mariste ont certes contribué à développer cette tendance. Issu du peuple, peuple par tout lui-même, il ne se résigne pas à une démocratie où l'égalité soit simple texte de loi. Et il bataille pour la justice au niveau des faits. Il s'est attiré ainsi des difficultés. Avec un brin de tristesse, il avoue : « ce que les intellectuels ne me passent pas, c'est d'être trop peuple. » [68] Son expérience de vie et l'Évangile expliquent cette prédilection foncière pour les petits. On s'en convaincra en lisant Sous le soleil de la pitié, surtout les pages 18 à 53, 81 et 82. [69]

Ce souci des délaissés se retrouve chez l'éducateur qu'il est par vocation. Il s'est engagé pour la démocratisation de l'école chez nous. De plus, en des pages vigoureuses, il révèle l'intérêt profond qu'il porte aux aspirations, aux détresses de plusieurs jeunes qui, comme Diogène avec son fanal en plein jour, cherchent en vain un adulte authentique pour les aider. [70]

Il a écrit : « Un maître, c'est un homme qui a su unifier sa vie autour d'une valeur. » [71] Pour l'homme dont je tente de saisir le mystère, la valeur centrale où tout se recoupe, c'est le Christ. Il a parlé de Jésus et de Sainte Marie en des accents d'une prenante beauté. [72] C'est du Christ qu'il nourrit sa préférence des humbles. [73] C'est encore le Christ qui motive son choix de l'exigeante vie consacrée, jour après jour depuis plus de 30 ans. Il a exprimé à sa façon pourquoi il demeurait Frère enseignant. Pour ma part, je trouve ces lignes d'une fraîcheur et d'une luminosité inusables. [74] Son amour pour l'Église ne s'est guère manifesté par des courbettes devant les chanoines (y a-t-il encore des chanoines ?), mais par un rappel aux chrétiens des impératifs de l'Évangile, surtout en ce qui regarde la justice et la sincérité. Il a osé écrire dans les Insolences : « Mon but en écrivant, c'est de servir l'Église. » [75] Et c'est vrai.

Travailler à la libération des hommes, participer à tous les combats contre les formes actuelles du mal qui les asservit, c'est exercer envers eux le ministère de l'espérance. Ce ministère, M. Desbiens l'exerce chez nous avec une franchise courageuse. Ce qui lui mérite des amitiés, mais aussi des coups durs. Mais il continuera, car c'est sa raison de vivre. Rappelant un souvenir vécu à quinze ans, où la vue des maisons illuminées pendant les Fêtes lui suggéra une image du bonheur humain auquel il renonçait, il écrit : « Beaucoup plus tard, je trouvai chez Saint-Exupéry l'expression parfaite de mon sentiment de ce soir-là : « Nous sommes quelques-uns debout, parmi les sédentaires, quelques-uns debout ayant charge de la ville. Avec notre option sur Dieu. » Au fond, et sur un plan purement humain, ajoute l'auteur, tel est mon sentiment : il faut des hommes qui veillent ; la cité a besoin de sentinelles, et conscientes de l'être. » Éblouissement d'adolescence devenu vocation d'âge mur !

Je finis sur une note intime. En vivant près de lui, j'ai fait une double découverte. D'abord, je me suis rendu compte avec étonnement qu'il était d'une grande réserve, d'une grande timidité. Il n'est vraiment à son meilleur qu'en un cercle réduit d'invités. Ensuite, j'ai trouvé dans sa vie de belles choses que j'avais d'abord rencontrées dans ses écrits. Mais, des travers qui lui restent, faut plus attendre qu'il se corrige : à quarante-six ans, on est ce qu'on est pour longtemps. Sacré vieux Frère Untel, salut !

Rosaire Bergeron



[1] Les Insolences au Frère Untel, Les Éditions de l'homme, Montréal, 1960. Nous abrégerons ce titre. Nous écrirons : Insolences.

[2] Je compte parmi les reportages modérés ceux qui se rapprochent de celui-ci : « un petit frère enseignant vient de publier quelques réflexions sur notre milieu social et religieux. Un recueil rempli d'intuitions étonnantes et d'observations peu banales. Quelques naïvetés, ici et là. Un cri de vérité qui perce dans un climat de restriction, de silence prudent et de crainte. » (Notre Temps, 12, déc. 60)

[3] Le Devoir, 5 nov. 1960. En ce même jour, La Presse annonçait : « Les Insolences du Frère Untel battent tous les records de l'édition canadienne. »

[4] Sous le soleil de la pitié, p. 67.

[5] Réal Béland (Ti-Gus) enregistre sur le Frère Untel un disque. Au Carnaval de Québec, on retrouve, dans la rue Sainte-Thérèse en monument de glace le Frère aux grands pieds donnant un coup de pied à la boîte de conserve. Au carnaval de Jonquière, des élèves taillent dans la neige le joual des Insolences. Peu avant l'émission Premier-plan, un étudiant en art dramatique de l'université de Montréal avait réalisé une performance : s'étant déguisé en bon mariste, il donna une conférence à un auditoire enthousiaste qui croyait rencontrer le vrai Frère Untel.

[6] À cette occasion, l'auteur souligna qu'il avait peu souffert pour la liberté comparativement à des centaines d'autres qui subissent la torture et même la mort, en divers pays, alors qu'ici, on n'attrape que quelque mise en quarantaine.

[7] La citation de St-Exupéry qui terminait a nourri longtemps ma méditation : « Nous sommes quelques-uns à veiller sur les hommes, auxquels les étoiles doivent leur réponse. Nous sommes quelques-uns debout, avec notre option sur Dieu. Portant la charge de la ville, nous sommes quelques-uns parmi les sédentaires, que durement flagelle le vent glacé qui tombe comme un manteau froid des étoiles. » Et l'auteur ajoutait : « Avec notre option sur Dieu. Et Sainte Marie. » (Insolences, p. 144)

[8] Extraits de lettres et télégrammes reçus par M. Desbiens.

[9] Jean-Claude Pinsonneault écrivait dans Salaberry, le 20 octobre 60 : « Quand ce ne sont pas quelques jeunes intellectuels en nourrice chez les penseurs étrangers ou quelque clique soi-disant d'avant-garde, c'est quelque obscur religieux qui, tout à coup, embouche les trompettes du jugement et englobe dans une commune réprobation à peu près tout ce que la province de Québec compte d'ecclésiastiques ».

[10] Le père Paul Guay ne prise pas les Insolences. Le Sulpicien se plaint de ce que "le bon Frère ne propose rien de concret, se retranchant derrière des outrances enfantines », en ce qui regarde la critique du Département de l'Instruction publique. Et il ajoute : « Je ne comprends pas qu'un homme de la taille d'André Laurendeau ait préfacé ce bric-à-brac excentrique ! » (P. Guay, in Le Droit, 24 septembre 60).

[11] « Ce livre contient quelques bonnes choses, mais il est tellement gâté par ses insolences et ses insuffisances qu'il faut admettre non seulement son inutilité, mais sa nocivité. Plusieurs le trouvent même subversif. Livre dynamique ? Non, dynamite ... dont l'explosion causera des dommages d'abord à l'auteur lui-même. » (Le Temps, 5 septembre 60)

[12] Sous le soleil de la pitié, p. 68.

[13] « Une grande part de l'étonnement, du « scandale », est venue du fait qu'un simple Frère enseignant, jusque là inconnu, pouvait nourrir de telles idées et oser les exprimer noir sur blanc en citant divers auteurs à la mode, Montherlant par exemple. On s'est tout de suite demandé : « Mais d'où qu'il sort ? »  (La Presse, 5 novembre 60)

[14] Nous rapportons deux témoignages. « Quant aux Insolences du Frère Untel, je ne crois pas personnellement que ce soit leur côté sensationnel qui en ait fait vendre quelque 50,000 exemplaires bien que l'auteur ne se gêne nullement pour appeler un chat un chat. Je crois que c'est plutôt parce que les critiques qu'elles formulent ou accompagnent trouvent un écho non seulement chez, les frères enseignants, mais dans le public. » (Le billet de Michèle Tisseyre in Photo-journal. semaine du 5 au 12 nov. 60)

« Pourquoi le livre jouit-il d'une telle popularité ? Ce n'est certes pas cet engouement morbide qui fait la fortune des feuilles jaunes. C'est que chaque instituteur a enfin trouvé quelqu'un qui exprime ouvertement ce qu'il pensait tout bas. Frère Untel, au nom de tous : Merci ! » (J. Mercil, Duvernay, in La Presse, 12 novembre 60)

[15] L'inspecteur d'écoles de mon district avouait : « Oui, le Frère Untel, ce qu'il nous dit sur la peur, c'est vrai que nous vivons ça, et à tous les niveaux. » Informations catholiques internationales, livraison du 15 oct. 60 commentait et citait Les Insolences sous le titre fort bien choisi : Notre-Dame de la Trouille.

Herman Desrosiers écrit : « Pour moi, ce livre est tout simplement formidable... Il est formidable parce qu'il démasque avec franchise, et une franchise exempte de la peur et de la contrainte, et à la hache s'il vous plaît, un vice profondément ancré chez nous : la peur. » (Herman Desrosiers, in La Presse, 10 nov. 60)

[16] Après avoir évoqué ses prédécesseurs, les frères Marie-Victorin, G. Dufresne ajoute : « Mais avec le Frère Untel nous avons quelque chose de plus : un véritable pamphlétaire qui mord à pleines mâchoires dans certains de nos principaux tabous ... Et aussi cette absence d'amertume, cette critique joyeuse en même temps que féroce, c'est vraiment une chose toute neuve pour nous trop habitués aux critiques en colère. »

(G. Dufresne in Le Quartier Latin, 3 nov. 60)

On rencontre des formules ainsi frappées : « C'est à la hache que je travaille. Remarquez que je n'aime pas ça. Je suis plutôt délicat par tempérament, aimant les morts, le fromage d'Oka et le café-brandy. »

Et encore : « Pour me faire comprendre d'eux (les élèves), je dois souvent recourir à l'une ou l'autre de leurs expressions jouales. Nous parlons littéralement deux langues, eux et moi. Et je suis le seul à parler les deux. » (Insolences, p. 27)

Cette agressivité amicale se manifeste en des tours du genre : « J'écris avec une hache... mes textes sont des actions... Je relaye Léon Bloy, génie en moins (…) il faut démolir. » (Insolences, p. 18)

[17] Insolences, p. 147

[18] L'auteur s'est expliqué récemment sur la genèse de ce livre : « Les textes parus dans Le Devoir à l'automne 59 et durant les 6 premiers mois de 1960 ont été à l'origine de tout. Rien n'avait été planifié. Chaque texte, dans mon idée, était le dernier ; cependant, une espèce de logique interne, interne quant à moi et interne quant à la situation, a fait que les sujets abordés étaient de plus en plus graves et de plus en plus engageants. » (Causerie prononcée devant l'assemblée annuelle des supérieurs majeurs des communautés d'hommes et de femmes du Québec. voir pp. 31-36).

[19] Pour illustrer, l'auteur présente un extrait de notre hymne national en « joual ». Ce sont des perles tirées des copies d'élèves du Secondaire.

" Au Canada, taire de nos ailleux,

Ton front est sein de fleurs en glorieux.

Car ton corps, c'est porter l'épée. Ton histoire est une épépée

Des plus brillantes histoires.

Et cavaleur

De foie Tremblay ... » (Insolences, p. 33)

[20] Insolences, p. 25

[21] Insolences, p. 25

[22] Insolences, p. 25

[23] Insolences, p. 26.

[24] Insolences, pp. 30-31.

[25] Voici les mesures draconiennes préconisées :

"Pour nous guérir (du joual), il nous faudrait des mesures énergiques. La hache ! la hache ! C'est à la hache qu'il faut travailler :

a) contrôle absolu de la Radio et de la TV. Défense d'écrire ou de parler joual sous peine de mort ;

b) destruction en une seule nuit, par la police provinciale de toutes les enseignes commerciales anglaises ou jouales ;

c) autorisation, pour deux ans, de tuer à bout portant tout fonctionnaire, tout ministre, tout professeur, tout curé, qui parle joual. » (Insolences, p. 28)

[26] Insolences, p. 29.

[27] Insolences, p. 29.

[28] Le 13 janvier 61, Serge de la Rochelle écrivait dans La Presse : « La publication, au Canada français d'un petit livre écrit « à la hache » a eu des répercussions inattendues. Les désormais fameuses « insolences », dont le tirage atteint presque les 100,000 copies, ont suscité chez nous une prise de conscience collective.

Notre presse écrite, parlée et télévisée, nos associations, nos gouvernements ont, directement ou indirectement, fait écho au cri d'alarme lancé par le Frère Pierre-Jérôme. »

[29] Je ne rapporte que ce témoignage : « Le R.F. Jérôme... a soulevé une campagne pour le bon parler français comme il ne s'en était jamais vue dans la province de Québec et son livre a eu de retentissants échos avec ses 100,000 exemplaires. » (Paul Tremblay, in le journal Lac-St-Jean, 11 janvier 61.)

[30] À Alma, par exemple, le gérant du Woolworth, M. Serge Rufiange, organise une campagne de refrancisation dans son magasin. Partout, on peut lire : ICI ON PARLE FRANCAIS. D'autres magasins imitent ce geste, à Jonquière, à Chicoutimi et ailleurs.

[31] Ainsi à l'examen de Rhétorique de 61, on demandait aux candidats de rédiger un discours contre le parler « joual » en signalant « la vaste campagne qui se mène contre le parler joual. »

[32] Dans Le Progrès du 7 avril 61, Rosaire Pelletier signalait :

« La guerre au joual est loin d'être terminée. Le cri d'alarme sonné par le Frère Untel, il y a déjà quelques mois, ne s'est pas perdu. Il se répercute encore dans des manifestations qu'il nous est donné de toucher tous les jours. »

[33] En septembre 67, lors d'un entretien à la biennale de la langue française, M. Desbiens déclarait : « Je ne suis pas inquiet pour la parole... je suis inquiet pour le français. Ici, d'abord, bien sûr, car c'est ici qu'il est le plus menacé ; mais aussi pour toute la francophonie.» Voir p. 179 (Communication à la biennale, le 7 septembre 67) C'est moi qui souligne.

[34] Insolences, pp. 35 et 52.

[35] Insolences, p. 38.

[36] Insolences, pp. 38 et 39.

[37] « Les enseignants ne savent rien. Et ils le savent mal. À l'école tous, qu'il faudrait les envoyer. » (Insolences, p. 48)

[38] Insolences, pp. 51 et 52.

[39] L'éducation au Québec, 10 ans après la réforme scolaire. Voir cet article sous la rubrique L'éducation, p. 165.

[40] Ibid.

[41] Qu'on relise les articles suivants sous la rubrique l'Éducation : (voir p. 165)

Une disponibilité contractée,

La réforme scolaire 1971,

La classification des enseignants.

[42] M. Desbiens remarque : « En fin de compte, on est amené à constater que si tout le monde voulait une réforme scolaire vers les années 60, il y en a moins qui aiment celle qui a été réalisée. Les enseignants sont révoltés, les administrateurs sont surmenés, les parents sont inquiets et les élèves indifférents ou eux-mêmes révoltés. La mécanique s'est grippée quelque part et la cause profonde nous échappe encore au sens où nous l'ignorons et au sens où nous n'avons pas prise sur elle. »

(L'éducation au Québec, 10 ans après la réforme scolaire, voir p. 165)

[43] De ces derniers, il affirme : « Leurs idées, leurs sentiments, leurs sentiments surtout, sur l'argent, les femmes, le succès et l'amour, sont aussi étrangers au christianisme qu'il est possible. » (Insolences, p, 81)

[44] La peur sévit même dans la religion vécue chez nous L'auteur s'attarde sur ce malaise. (Insolences, pp. 66-82)

[45] « Sans approuver toutes les assertions du Frère Untel, ... il faut convenir cependant qu'il nous rappelle de graves vérités, qu'il a un courage peu commun, parfois iconoclaste et fanfaron et qu'il écrit magnifiquement.

Il nous avertit même qu'il écrit à la hache : quand il aura vieilli de vingt ans, je parierais qu'il ne signera pas le même livre et qu'il emploiera sans doute la modeste plume d'oie, bien taillée, pour nous faire part, dans un style édulcoré, de ses “humbles repentances”. »

(Louis-Philippe Audet, Propos sur l'éducation, in L'Action, 6 nov. 60)

[46] Les dangers qui menacent la démocratie chez nous le font fréquemment intervenir. Qu'on relise les articles sous la rubrique Octobre 70. (voir p. 201)

[47] Sous le soleil de la pitié, p. 99. Les pages 93 à 100 explicitent ce point.

[48] Voir La fidélité sous la rubrique L'Indépendance, p. 37

[49] Ce texte est récent. Il est, en quelque sorte, la conclusion d'une recherche chez M. Desbiens qui ne semblait pas en faveur de l'indépendance si l'on remonte à quelques années.

[50] Voir Sous le soleil de la pitié, p. 9- 10.

[51] Voir les articles sous la rubrique Octobre 70, p. 201. Surtout La veille d'un homme, L'anarchie ou la démocratie, Le terrorisme.

[52] M. Desbiens occupe maintenant le poste de directeur général au Campus Notre-Dame-de-Foy de Cap-Rouge.

[53] Sous le soleil de la pitié, p. 92.

[54] Des écrits sur ces diverses questions se retrouvent en ce volume.

[55] Voir les articles rassemblés sous la rubrique Intemporel, p. 231 : Colomb, Lindbergh, Armstrong, François Mauriac, L'otage c'est la planète, La paix par le ping-pong, De la lune au Bengale, La monnaie de la méfiance.

[56] Sous le soleil de la pitié, paru aux Éditions du Jour en 1965 ; 3 éditions françaises totalisant 22,000 exemplaires ; l'édition anglaise comprend 5 000 exemplaires. En ces pages limpides et graves, attendries même, l'auteur raconte ses jeunes années au foyer de ses parents et chez les Frères Maristes. C'est un ouvrage à lire pour connaître comment la Crise a été vécue en milieu rural du Québec. L'auteur révèle un aspect important de son passé et de son mystère.

[57] Sous le soleil de la pitié, p. 38

[58] Sous le soleil de la pitié, p. 39.

[59] Les Insolences, p. 101.

[60] Les forceries scolaires, voir p. 118.

[61] L'âge d'or de la justice, voir p. 277.

[62] La quantité de la langue, voir p. 193. C'est la raison qui peut nous unir à un certain plan : « Je ne peux pas imaginer que deux hommes ne puissent pas s'entendre, s'ils décident de parier raison. » (Le kidnapping du public, voir p. 249).

[63] La démocratie imparfaite, voir p. 261.

[64] L'information est un bien commun, 252.

[65] Le kidnapping du public, voir p. 249.

[66] Les salaires de la mort, voir p. 274.

[67] C'est un nomme enthousiaste et simple. il aime les choses et les mots savoureux ; mais son goût instinctif le porte vers les gens simples, et peut-être en particulier les vieilles gens qui ne sont pas sortis de l'obscurité. » (Préface aux Insolences, p. 16)

[68] L'inconfort intellectuel, voir p. 225.

[69] voir aussi L'âge d'or de la justice, p. 277 et La mort d'un seigneur, p. 283.

[70] Je renvoie ici aux articles sous la rubrique : La Jeunesse, p. 87. Ces pages lucides forcent à réfléchir. Ainsi, au sujet du festival de Manseau, il affirme : « Cet événement nous signifie de bien des façons que les jeunes ne croient plus qu'en eux-mêmes, désespérés de n'avoir en face d'eux, que des commerçants et des politiciens. » (Les enfants orphelins, p. 98).

[71] Sous le soleil de la pitié, p. 50.

[72] Voir les Insolences, p. 134 ; Sous le soleil de la pitié, p. 182-187 ; Lettre à Jésus-Christ, p. 25.

[73] Voir Le grand Renverseur, p. 5 ; Sous le soleil de la pitié, p. 86-87. « Le monde est plein d'êtres qui aiment Jésus-Christ sans le savoir. Aimer le Christ, où que l'on soit, cela consiste toujours à aimer les hommes. À la limite, payer ses impôts, c'est aimer le Christ. C'est la façon électronique, I.B. M. et perforée de laisser sa main gauche ignorer ce que fait sa main droite, comme nous le demande le sermon sur la montagne. L'impôt payé à Québec contribue à entretenir un foyer de vieillards en Abitibi ou au Lac-Saint-Jean. » (lbid, p. 86)

[74] Voir Sous le soleil de la pitié, p. 71-92 ; les Insolences, p. 117-144. Au sujet de la vie religieuse, il souligne : « L'Église a voulu qu'il y ait des hommes et des femmes qui vivent, dès maintenant, la vie future telle qu'elle est promise à tous ceux qui cherchent Jésus-Christ. » (Sous le soleil de la pitié, p. 82). Mais c'est rude : « S'embarquer directement pour Jésus-Christ (comme on dit s'embarquer pour le Havre) est une aventure effrayante, car ce n'est pas un petit risque que de s'embarquer pour toujours sur un bateau qui ne doit jamais faire escale. » (Ibid)

[75] Insolences, p. 149.


Retour au texte de l'auteur: Jean-Paul Desbiens, philosophe et essayiste Dernière mise à jour de cette page le lundi 20 avril 2009 8:06
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi.
 



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