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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

LE FUTUR A-T-IL UN AVENIR ? Pour une responsabilité socio-éconogique. (2012)
Préface


Une édition électronique réalisée à partir du livre de Philippe LEBRETON, LE FUTUR A-T-IL UN AVENIR ? Pour une responsabilité socio-éconogique. Paris: Les Éditions Sang de la Terre, — Écologie-Environnement-Société, 2012, 384 pp. [L'auteur nous a transmis son autorisation le 9 juillet 2015, par l'intermédiaire de Monsieur Ivo Rens, professeur émérite de l'Université de Genève, de diffuser ce livre en accès libre dans Les Classiques des sciences sociales.]

[7]

Le futur a-t-il un avenir ?
(pour une responsabilité socio-écologique)


Préface


Il fut un temps où l'Occident était persuadé que la justice sociale suivrait nécessairement le développement industriel et que celui-ci assurerait progressivement à tout le Tiers Monde un niveau de vie semblable au nôtre. Nous n'avions pas pris garde au fait que ce type de développement avait été gagé par quantité de conflits meurtriers, dont deux guerres mondiales et leurs innombrables victimes sur tous les continents ; nous n'avions pas pris garde non plus aux dégâts qu'il avait causés à une nature déjà mise à sac en plusieurs lieux ; nous n'avions pas pris garde enfin au caractère limité des ressources tant énergétiques que matérielles qui interdirait l'universalisation du niveau moyen de vie atteint en Occident.

Ce temps révolu mais guère lointain, c'est celui des Trente Glorieuses, ces trente années d'expansion économique triomphaliste qui suivirent la Deuxième Guerre mondiale et accréditèrent le mirage d'un progrès illimité de l'espèce humaine. Bien isolés furent alors les quelques auteurs qui dénoncèrent les périls qui nous attendaient, même en l'absence d'une troisième guerre mondiale : la détérioration voire la désertification des sols (Fairfield Osborn, La Planète au pillage, 1949), l'explosion démographique (Gaston Bouthoul, La Surpopulation dans le monde, 1958), l'empoisonnement chimique de la biosphère (Rachel Carson, Printemps silencieux, 1963), la finitude des ressources terrestres (Nicholas Georgescu-Roegen, La loi de l'entropie et le processus économique, 1971) ainsi que les limites à la croissance (Meadows et consorts, Rapport au Club de Rome, 1972).

Le premier choc pétrolier en 1973-1974 opéra une première fissure dans l'idéologie de la croissance. En France, Philippe Lebreton figure parmi les tout premiers scientifiques à avoir remis en cause, notamment dans son livre L'énergie, c'est vous... (1974), la pertinence du choix de l'électronucléaire que venait d'opérer un gouvernement enivré par son accession au statut de puissance nucléaire militaire. Ce livre est aussi un ouvrage pionnier par sa vulgarisation des fondements de la science écologique, des contraintes énergétiques [8] inhérentes à la thermodynamique et de ce que l'auteur appelle désormais le « dérèglement climatique ». Par ce livre et par ses ouvrages postérieurs, Philippe Lebreton a puissamment contribué à la prise de conscience écologique en France et dans les pays francophones. Mais pour l'idéologie scientiste, à forte composante marxiste, toujours véhiculée par les grandes écoles qui forment ou déforment la classe dirigeante française, Philippe Lebreton reste coupable d'avoir dénoncé deux tabous, la foi nataliste et la foi nucléaire.

Le lecteur tient dans ses mains un livre dans lequel l'auteur entreprend de poser un diagnostic sans complaisance et de conjecturer une prospective audacieuse et parfois paradoxale du développement de la France et de l'Humanité sur la base de trois variables : la démographie, l'énergie et les ressources matérielles, principalement la terre et l'eau douce. Pour ce faire, Philippe Lebreton présente une impressionnante quantité de données chiffrées, puisées aux meilleures sources, qu'il discute dans une perspective délibérément pluridisciplinaire car tributaire de la science écologique. Son texte est entrecoupé non seulement de tableaux et de graphiques, mais aussi d'encarts dans lesquels il cite divers auteurs et ne dédaigne pas d'agrémenter occasionnellement son propos de saillies satiriques qui constituent autant de sourires, parfois grinçants, dans un discours assez sombre sur l'avenir.

La partie la plus originale de l'ouvrage réside probablement dans les deux « scénarios démo-énergétiques » qu'il envisage pour la période 2010-2050. Il les appelle respectivement « scénario de consensus avec régulation démographique et amélioration énergétique » et « scénario de laisser-aller sans régulation démographique ni révision énergétique notable ». Ces scénarios réservent au lecteur quelques surprises. Mais, dans les deux cas, émergent deux sous-ensembles démographiques qui constitueront, d'après lui, les « victimes prioritaires » des restrictions et pénuries à venir, à savoir la jeunesse actuelle et l'Afrique subsaharienne, pour des raisons partiellement différentes. La jeunesse actuelle a été élevée dans l'idéologie de la croissance avec, circonstance aggravante, « le superflu considéré comme le nécessaire, l'artificiel comme le naturel, le virtuel comme le réel. Comment réagiront-ils (les jeunes) : marginalisation, déliquescence, révolte ? » Quant à l'Afrique subsaharienne, dont la population a atteint un milliard d'habitants en 2009 mais dont la natalité est telle qu'elle en compterait plus de deux milliards en 2050, son avenir apparaît particulièrement compromis.

Que l'on parle du nombre d'« esclaves énergétiques » ou de l'empreinte écologique de notre espèce, il est clair pour Philippe Lebreton que, globalement, l'Humanité vit au-dessus de ses moyens en tirant des « chèques de ressources et de déchets » sur l'avenir que nos enfants et petits-enfants devront rembourser d'une manière ou l'autre. Certains « futurologues candides » lui prédisent néanmoins un avenir brillant grâce à son expansion sur Mars ou une autre planète.

Dans la mythologie grecque, seul le titan Kronos avait la cruauté perverse de dévorer ses propres enfants...

Ivo RENS

Professeur honoraire de l'Université de Genève

Octobre 2011.



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le mardi 29 septembre 2015 13:37
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur associé, Université du Québec à Chicoutimi.
 



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