Marc-Adélard Tremblay (1922 - )

Anthropologue, retraité, Université Laval

“Le Centre d’études nordiques
de l’Université Laval”.

Un article publié dans la revue Recherches sociographiques, vol. 3, no 3, septembre-décembre 1962, pp. 371-373. Québec, département de sociologie et d'anthropologie de l'Université Laval. Presses de l'Université Laval.

C'est par un arrêté en conseil préparé à l'instigation du premier ministre du Québec que naissait, le 2 août 1961, le Centre d'études nordiques (C.E.N.) de l'Université Laval. L'arrêté ministériel entérinait ainsi une résolution adoptée par le Conseil de la même université le 14 avril précédent. L'inauguration officielle de ce Centre, rattaché à l'Institut de géographie, eut lieu le 27 février 1962 à la Cité Universitaire de Sainte-Foy. [1]

Bien qu'affilié à un Institut de géographie, le Centre est de caractère multidisciplinaire. Le problème lui-même (les différents aspects de la vie dans les régions nordiques) plutôt qu'une discipline donnée devient le principe qui encadre toutes les activités des chercheurs, à quelque discipline qu'ils appartiennent : biologie, botanique, géologie, histoire, linguistique, météorologie, sciences sociales, zoologie, etc.... On ambitionne ainsi de [372] coordonner toutes les études entreprises dans les régions nordiques [2] par des chercheurs de Laval ou d'autres universités et par tout autre organisme, privé ou public, intéresse au Nord. Le caractère interdisciplinaire du Centre se reflète d'ailleurs dans la composition de son conseil de direction : Louis-Edmond Hamelin, président du conseil, géographe ; Robert Bergeron, secrétaire du conseil, géologue ; Louis Lemieux, biologiste ; Fernand Grenier, responsable des éditions, historien et géographe ; M.-Adélard Tremblay, président du comité des candidatures, agronome et anthropologue.

Le Centre est à la fois un institut de recherche et une fondation. En tant qu'institut, il groupe et intègre dans un même cadre administratif et académique une équipe permanente de chercheurs qui effectuent des travaux théoriques et empiriques sur le Nord. En tant que fondation, il distribue chaque année, par voie de concours, des bourses d'étude et des subventions de recherche à ceux qui s'intéressent aux régions septentrionales du Québec et du Canada tout entier. [3] Soulignons que le professeur Jacques Rousseau, bien connu pour ses nombreux travaux nordiques, est un chercheur titulaire au C.E.N. Il travaille présentement sur des manuscrits qui seront publiés durant les prochaines années [4] et assistera les jeunes chercheurs qui viendront remplir les postes à mesure que ceux-ci seront créés. L'an dernier seulement, le Centre a subventionné une vingtaine de projets de recherche différents.

En plus d'inventorier sur place les multiples problèmes du Nord québécois [5] le Centre veut aussi diffuser les connaissances ainsi acquises d'une triple façon : a) par l'établissement d'un service de documentation et d'information où seront colligés et classifiés photos aériennes, cartes, revues, ouvrages spécialisés, se rapportant aux pays froids ; b) par la publication de tous les travaux d'intérêt scientifique ; et c) par la création de quelques cours fondamentaux sur les régions nordiques.

Le Centre obtient les ressources financières nécessaires à ses projets de recherche de plusieurs organismes différents. Jusqu'à présent, il a bénéficié de subventions provenant des sources suivantes :

a) Le Ministère des Richesses naturelles du Québec ;

b) le Conseil national des recherches ;

c) l'Arctic Institute of North America ;

d) le gouvernement fédéral (Ministère des Ressources nationales et du Nord canadien) ; et,

e) bien entendu, l'Université Laval elle-même.

Il nous est impossible de dresser la liste de tous les travaux en cours. Qu'il suffise de mentionner ceux qui sont les plus avancés :

a) La publication de la thèse de M^e Henri Dorion sur le tracé de la frontière Québec - Terre-Neuve au Labrador (publication n^o 1 du C.E.N.) ;

b) Un dictionnaire esquimau-français du Révérend Père Schneider, o.m.i. ;

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c) La publication des thèses doctorales du professeur Pierre Biays sur les communautés frontalières et sur l'étude périglaciaire de la côte sud du Detroit d'Hudson ;

d) Un inventaire cartographique et historique de la Péninsule du Quebec-Labrador ;

e) Des travaux de géomorphologie en Alaska, au détroit d'Hudson, dans les régions de Kaniapiskau et Schefferville et à Fort-Chimo ;

f) Une bibliographie systématique et exhaustive, sur fiches, de l'ensemble des travaux sur les régions nordiques et polaires sous la direction de M. Allan Cooke, bibliothécaire à la Stefanson Collection, de Hanover, au New-Hampshire ;

g) Quelques travaux en anthropologie culturelle sur les Esquimaux et les Indiens ; et,

h) La publication d'un recueil de travaux sur les aspects physiques et biologiques de la Péninsule du Québec-Labrador.

Malgré son jeune âge, le C.E.N. a déjà quelques réalisations importantes à son actif comme en témoigne cette liste de travaux complétés ou en cours. Le C.E.N. étudie les possibilités d'établir des stations permanentes et temporaires de recherche dans le grand Nord, ambitionne d'élargir ses cadres en embauchant des chercheurs permanents dans diverses disciplines, entreprend la préparation d'une série de monographies sur les agglomérations des Territoires du Québec et nourrit plusieurs autres projets.

À l'heure où le Québec s'éveille à la planification et à la valeur stratégique des ressources de ses territoires nordiques, le Centre est plus qu'une expérience novatrice bien amorcée, il est le symbole même d'une présence et d'une conscience nouvelles.

Marc-Adélard TREMBLAY

Département de sociologie et d'anthropologie,
Université Laval.